Nochebuena / Nuit de Noël - Guy de Maupassant
1.

¡La Nochebuena! ¡Ah, la Nochebuena! Jamás celebraré yo la Nochebuena…

"Le Réveillon! le Réveillon! Ah! mais non, je ne réveillonnerai pas !"

2.

Y Enrique Templier decía esto con una voz tan furiosa como si le propusieran una infamia.

Le gros Henri Templier disait cela d'une voix furieuse, comme si on lui eût proposé une infamie.

3.

Los otros, riendo, exclamaban: —¿Por qué te encolerizas así?

Les autres, riant, s'écrièrent : "Pourquoi te mets-tu en colère ?"

4.

—Porque la Nochebuena me ha jugado la más abominable de las burlas. Porque guardo un invencible horror a esta noche de alegría imbécil.

Il répondit : "Parce que le réveillon m'a joué le plus sale tour du monde, et que j'ai gardé une insurmontable horreur pour cette nuit stupide de gaieté imbécile.

5.

—¿Qué fue?

- Quoi donc ?

6.

—¿Qué? ¿Vosotros queréis saberlo? Pues escuchad. 

- Quoi ? Vous voulez le savoir ? Eh bien, écoutez :

7.

Aquel invierno era muy frío, tan frío que hacía morir a los pobres en las calles. 

Vous vous rappelez comme il faisait froid, voici deux ans, à cette époque ; un froid à tuer les pauvres dans la rue. La Seine gelait, les trottoirs glaçaient les pieds à travers les semelles des bottines ; le monde semblait sur le point de crever.

8.

Tenía yo entonces entre manos una obra urgente y rehusé todas las invitaciones que me fueron hechas para celebrar la Nochebuena, prefiriendo pasar la noche delante de mi mesa de trabajo. Comí solo y volví a mi tarea. Pero hacia las diez, el ruido de las calles, que a pesar de mis preocupaciones percibía, y los preparativos de cena que se advertían en la vecindad, me agitaron. No sabía lo que hacía. Escribía cien disparates y comprendí que no haría cosa de provecho en aquella noche. 

J'avais alors un gros travail en train et je refusai toute invitation pour le réveillon, préférant passer la nuit devant une table. Je dînai seul ; puis je me mis à l'oeuvre. Mais voilà que, vers dix heures, la pensée de la gaieté courant Paris, le bruit des rues qui me parvenait malgré tout, les préparatifs de souper de mes voisins, entendus à travers les cloisons, m'agitèrent. Je ne savais plus ce que je faisais ; j'écrivais des bêtises ; et je compris qu'il fallait renoncer à l'espoir de produire quelque chose de bon cette nuit-là.

9.

Daba grandes paseos por mi cuarto; me sentaba, me levantaba; indudablemente sufría la misteriosa influencia de la alegría de fuera, y me resigné. 

Je marchai un peu à travers ma chambre. Je m'assis, je me relevai. Je subissais, certes, la mystérieuse influence de la joie du dehors, et je me résignai. 

10.

Llamé a mi muchacha y le dije: —Ángela, vaya usted a buscar cena para dos; ostras, una perdiz y cangrejos, jamón y pasteles. Traiga usted también dos botellas de champaña; ponga dos cubiertos y acuéstese usted.

Je sonnai ma bonne et je lui dis : "Angèle, allez m'acheter de quoi souper à deux : des huîtres, un perdreau froid, des écrevisses, du jambon, des gâteaux. Montez-moi deux bouteilles de champagne : mettez le couvert et couchez-vous."

11.

Obedeció un poco sorprendida. Cuando todo estuvo preparado me puse el abrigo y salí.

Elle obéit, un peu surprise. Quand tout fut prêt, j'endossai mon pardessus, et je sortis.

12.

Quedaba una gran cuestión que resolver. ¿Con quién celebraría mi Nochebuena? Mis amigos estarían todos invitados. Para contar con uno hubiera sido necesario comprometerle anticipadamente. Entonces pensé en realizar una buena acción al mismo tiempo que me procuraba compañía. Y me dije: "París está lleno de hermosas y pobres jóvenes que no tienen cena esta noche y que andan errantes en busca de un muchacho generoso. Yo seré la Providencia de Navidad para una de esas desheredadas. 

Une grosse question restait à résoudre : Avec qui allais-je réveillonner ? Mes amies étaient invitées partout. Pour en avoir une, il aurait fallu m'y prendre d'avance. Alors, je songeai à faire en même temps une bonne action. Je me dis : Paris est plein de pauvres et belles filles qui n'ont pas un souper sur la planche, et qui errent en quête d'un garçon généreux. Je veux être la Providence de Noël d'une de ces déshéritées.

13.

Voy a corretear un poco por las calles, entraré en los lugares del placer, preguntaré, ojearé y escogeré a mi gusto.

Je vais rôder, entrer dans les lieux de plaisir, questionner, chasser, choisir à mon gré.

14.

Y empecé a recorrer la ciudad. 

Et je me mis à parcourir la ville.

15.

Desde luego, encontré gran número de muchachas infelices que buscaban aventura, pero unas eran feas hasta proporcionar una indigestión, y otras tan delgadas que podían quebrarse por los pies si se tropezaban. 

Certes, je rencontrai beaucoup de pauvres filles cherchant aventure, mais elles étaient laides à donner une indigestion, ou maigres à geler sur pied si elles s'étaient arrêtées.

16.

Yo soy débil, ya lo sabéis. Adoro a las mujeres llenitas. Cuanto más metidas en carnes, más me gustan. 

J'ai un faible, vous le savez, j'aime les femmes nourries. Plus elles sont en chair, plus je les préfère.. Une colosse me fait perdre la raison.

17.

De pronto, cerca del teatro de Variedades, descubro un perfil que me agrada. Una cabeza hermosa y dos curvas atractivas: la del pecho, muy bella; la de más abajo, sorprendente. Una barriga de pato gordo. Me quedaba un punto que esclarecer: el rostro.

Soudain, en face du théâtre des Variétés, j'aperçus un profil à mon gré. Une tête, puis, par-devant, deux bosses, celle de la poitrine, fort belle, celle du dessous surprenante : un ventre d'oie grasse. J'en frissonnai, murmurant : "Sacristi, la belle fille !" Un point me restait à éclaircir : le visage.

18.

El rostro es el postre; y el resto, el asado. 

Le visage, c'est le dessert ; le reste c'est... c'est le rôti.

19.

Apreté el paso. Era encantadora, muy joven, morena y con grandes ojos negros. 

Je hâtai le pas, je rejoignis cette femme errante, et , sous un bec de gaz, je me retournai brusquement. Elle était charmante, toute jeune, brune, avec de grands yeux noirs.

20.

Le hice mi proposición, que aceptó sin vacilar. 

Je fis ma proposition qu'elle accepta sans hésitation.

21.

Un cuarto de hora después estábamos sentados a la mesa en el comedor de mi casa.

Un quart d'heure plus tard, nous étions attablés dans mon appartement.

22.

Al entrar exclamó: —¡Ah, qué bien se está aquí!

Elle dit en entrant : "Ah ! on est bien ici."

23.

Y miraba alrededor con la satisfacción visible de haber encontrado habitación y mesa en aquella noche glacial. Era una mujer arrogante y gruesa. 

Et elle regarda autour d'elle avec la satisfaction visible d'avoir trouvé la table et le gîte en cette nuit glaciale. Elle était superbe, tellement jolie qu'elle m'étonnait, et grosse à ravir mon coeur pour toujours.

24.

Se quitó el abrigo y el sombrero. Se sentó y se puso a comer; pero no parecía del todo bien dispuesta. De cuando en cuando, su cara, un poco pálida, se alteraba como si sufriese un dolor oculto. 

Elle ôta son manteau, son chapeau, s'assit et se mit à manger ; mais elle ne paraissait pas en train, et parfois sa figure un peu pâle tressaillait comme si elle eût souffert d'un chagrin caché.

25.

Le pregunté:—¿Tienes algún disgusto?, ¿te pasa algo?

Je lui demandai: "Tu as des embêtements ?"

26.

Me contestó:—¡Bah! Olvidémonos de todo.

Elle répondit : "Bah ! oublions tout."

27.

Empezó a beber. Vaciaba de un sorbo su vaso de champaña y lo llenaba sin cesar. 

Et elle se mit à boire. Elle vidait d'un trait son verre de champagne, le remplissait et le revidait encore, sans cesse.

28.

Bien pronto empezó a ponerse encarnada y a reír locamente. 

Bientôt un peu de rougeur lui vint aux joues ; et elle commença à rire.

29.

Yo la adoraba ya. La besaba apasionadamente y descubrí que no era vulgar ni grosera.

Moi, je l'adorais déjà, l'embrassant à pleine bouche, découvrant qu'elle n'était ni bête, ni commune, ni grossière comme les filles du trottoir. Je lui demandai des détails sur sa vie. Elle répondit : "Mon petit, cela ne te regarde pas !"

30.

Pero, una hora más tarde...

Hélas ! une heure plus tard ...

31.

En fin: llegó el momento de acostarse, y mientras yo levantaba la mesa colocada delante de la chimenea, ella se desnudó vivamente y se deslizó entre las sábanas. 

Enfin, le moment vint de se mettre au lit, et, pendant que j'enlevais la table dressée devant le feu, elle se déshabilla hâtivement et se glissa sous les couvertures.

32.

Mis vecinos hacían un ruido infernal, riendo y cantando como locos, y yo pensaba: "He hecho bien en ir a buscar a esta hermosa muchacha. No habría sido posible trabajar de ningún modo.

Mes voisins faisaient un vacarme affreux, riant et chantant comme des fous ; et je me disais : "J'ai eu rudement raison d'aller chercher cette belle fille ; je n'aurai jamais pu travailler."

33.

Un quejido profundo me hizo volver la cabeza. —¿Qué tienes, querida? No respondió, pero siguió suspirando dolorosamente, como si sufriera de una manera horrible.

Un profond gémissement me fit retourner. Je demandai: "Qu'as-tu, ma chatte ?" Elle ne répondit pas, mais elle continuait à pousser des soupirs douloureux, comme si elle eût souffert horriblement.

34.

—¿Estás indispuesta? —le pregunté.

Je repris : "Est-ce que tu te trouves indisposée ?" Et soudain elle jeta un cri, un cri déchirant. Je me précipitai, une bougie à la main.

35.

Entonces lanzó un grito, un grito espantoso. Me precipité hacia ella con una bujía en la mano. Su fisonomía estaba descompuesta por el dolor. Se retorcía las manos y salían de su garganta gemidos sordos como el estertor de un agonizante. 

Son visage était décomposé par la douleur, et elle se tordait les mains, haletante, envoyant du fond de sa gorge ces sortes de gémissements sourds qui semblent des râles et qui font défaillir le coeur.

36.

Aturdido, yo le preguntaba: —¿Qué tienes?

Je demandai, éperdu : "Mais qu'as-tu ? dis-moi, qu'as-tu ?"

37.

No respondía y comenzó a dar alaridos. 

Elle ne répondit pas et se mit à hurler.

38.

De pronto, las vecinas callaron y se pusieron a escuchar lo que pasaba en mi habitación.

Tout à coup les voisins se turent, écoutant ce qui se passait chez moi.

39.

—¿Qué tienes? Dímelo —repetía yo—. ¿Qué te duele?

Je répétais : "Où souffres-tu, dis-moi, où souffres-tu ?"

40.

Entonces balbuceó: —¡Oh, mi vientre, mi vientre! Levanté sus ropas y vi…

Elle balbutia : "Oh ! mon ventre ! mon ventre !" D'un seul coup je relevai la couverture, et j'aperçus...

41.

Aquella mujer, amigos míos ¡estaba dando a luz!

Elle accouchait, mes amis.

42.

Entonces, con la cabeza perdida, fui hacia la pared de mi cuarto y empecé a dar puñetazos gritando con todas mis fuerzas: —¡Socorro, socorro!

Alors je perdis la tête ; je me précipitai sur le mur que je heurtai à coups de poing, de toute ma force, en vociférant : "Au secours, au secours !"

43.

La puerta se abrió y se precipitó en mi cuarto una multitud de hombres vestidos de frac, mujeres escotadas, pierrots, turcos, mosqueteros. Esta invasión me enloquecía de tal modo que no acertaba a encontrar una explicación. 

Ma porte s'ouvrit ; une foule se précipita chez moi, des hommes en habit, des femmes décolletées, des Pierrots, des Turcs, des Mousquetaires. Cette invasion m'affola tellement que je ne pouvais même plus m'expliquer.

44.

Temían un accidente grave, un crimen, quizá, y no me comprendían. 

Eux, ils avaient cru à quelque accident, à un crime peut-être, et ne comprenait plus.

45.

Yo pude decir al fin: —Es… es que está dando a luz.

Je dis enfin : "C'est... c'est... cette... cette femme qui... qui accouche."

46.

Entonces todos la examinaron, dando cada uno su opinión. Un capuchino, sobre todo, pretendía ser inteligente en el asunto y quería ayudar a la Naturaleza. 

Alors tout le monde l'examina, dit son avis. Un capucin surtout prétendait s'y connaître, et voulait aider la nature.

47.

Todos estaban más o menos borrachos y creo que la hubieran matado. Yo me precipité sin sombrero por la escalera para buscar un médico viejo que vivía cerca. 

Ils étaient gris comme des ânes. Je crus qu'ils allaient la tuer ; et je me précipitai, nu-tête, dans l'escalier, pour chercher un vieux médecin qui habitait dans une rue voisine.

48.

Cuando volví con el médico, los vecinos de todos los pisos ocupaban mi habitación. Cuatro desahogados, sentados a la mesa, concluían con mis cangrejos y mi champaña.

Quand je revins avec le docteur, toute ma maison était debout ; on avait rallumé le gaz de l'escalier ; les habitants de tous les étages occupaient mon appartement ; quatre débardeurs attablés achevaient mon champagne et mes écrevisses.

49.

A mi llegada, oí un grito formidable y una lechera me presentó sobre una tabla un pedazo de carne, arrugada y doblada, que gemía y maullaba como un gato. —Es una niña —me dijo.

A ma vue, un cri formidable éclata, et une laitière me présenta dans une serviette un affreux petit morceau de chair ridée, plissée, geignante, miaulant comme un chat ; et elle me dit : "C'est une fille."

50.

El médico examinó a la recién parida, declarando que su estado era grave por haber sucedido el parto después de una cena, y se fue, anunciándome que mandaría a una enfermera y una nodriza. 

Le médecin examina l'accouchée, déclara douteux son état, l'accident ayant eu lieu immédiatement après un souper, et il partit en annonçant qu'il allait m'envoyer immédiatement une garde-malade et une nourrice.

51.

Las dos mujeres llegaron una hora después, trayendo un paquete de medicamentos. 

Les deux femmes arrivèrent une heure après, apportant un paquet de médicaments.

52.

Yo pasé la noche en una butaca, demasiado aturdido para poder reflexionar sobre las consecuencias del lance.

Je passai la nuit dans un fauteuil, trop éperdu pour réfléchir aux suites.

53.

Volvió el médico por la mañana y halló bastante mal a la enferma.

Dès le matin, le médecin revint. Il trouva la malade assez mal.

54.

—Su mujer de usted —me dijo.

Il me dit : "Votre femme, monsieur..."

55.

—No es mi mujer —le interrumpí.

Je l'interrompis : "Ce n'est pas ma femme."

56.

—O su querida, poco me importa —y siguió enumerando los cuidados, los medicamentos y el régimen que necesitaba.

Il reprit : "Votre maîtresse, peu m'importe." Et il énuméra les soins qu'il lui fallait, le régime, les remèdes.

57.

¿Qué hacer? Enviar a esa desgraciada al hospital hubiera significado aparecer a los ojos de toda la vecindad, del barrio entero, como un desalmado. 

Que faire ? Envoyer cette malheureuse à l'hôpital ? J'aurais passé pour un manant dans toute la maison, dans tout le quartier.

58.

La retuve en mi casa y estuvo seis semanas enferma en mi misma cama.

Je la gardai. Elle resta dans mon lit six semaines.

59.

¿El niño? Lo di a criar en un pueblo cercano. Me cuesta cincuenta pesetas al mes y, habiendo pagado hasta hoy, me veo obligado a pagar hasta que me muera. 

L'enfant ? Je l'envoyai chez des paysans de Poissy. Il me coûte encore cinquante francs par mois. Ayant payé dans le début, me voici forcé de payer jusqu'à ma mort.

60.

Cuando tenga criterio para comprender, supondrá que soy su padre.

Et, plus tard, il me croira son père.

61.

Y para colmo de desdichas, cuando estuvo curada…, me quería, me quería con delirio la muy…

Mais, pour comble de malheur, quand la fille a été guérie... elle m'aimait... elle m'aimait éperdument, la gueuse !

62.

Y bien...?

- Eh bien ?

63.

Pero se puso delgada como un gato hambriento. Y me paso el día huyendo de la maldita, que parece un esqueleto, y me aguarda en las calles, se esconde para verme pasar, me detiene de noche cuando salgo, para besarme la mano, me aburre y me vuelve loco. Ya sabéis por qué no celebraré nunca la Nochebuena.»

- Eh bien, elle était devenue maigre comme un chat de gouttières ; et j'ai flanqué dehors cette carcasse qui me guette dans la rue, se cache pour me voir passer, m'arrête le soir quand je sors, pour me baiser la main, m'embête enfin à me rendre fou.

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Guy de Maupassant

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Nochebuena / Nuit de Noël

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1.

¡La Nochebuena! ¡Ah, la Nochebuena! Jamás celebraré yo la Nochebuena…

"Le Réveillon! le Réveillon! Ah! mais non, je ne réveillonnerai pas !"

2.

Y Enrique Templier decía esto con una voz tan furiosa como si le propusieran una infamia.

Le gros Henri Templier disait cela d'une voix furieuse, comme si on lui eût proposé une infamie.

3.

Los otros, riendo, exclamaban: —¿Por qué te encolerizas así?

Les autres, riant, s'écrièrent : "Pourquoi te mets-tu en colère ?"

4.

—Porque la Nochebuena me ha jugado la más abominable de las burlas. Porque guardo un invencible horror a esta noche de alegría imbécil.

Il répondit : "Parce que le réveillon m'a joué le plus sale tour du monde, et que j'ai gardé une insurmontable horreur pour cette nuit stupide de gaieté imbécile.

5.

—¿Qué fue?

- Quoi donc ?

6.

—¿Qué? ¿Vosotros queréis saberlo? Pues escuchad. 

- Quoi ? Vous voulez le savoir ? Eh bien, écoutez :

7.

Aquel invierno era muy frío, tan frío que hacía morir a los pobres en las calles. 

Vous vous rappelez comme il faisait froid, voici deux ans, à cette époque ; un froid à tuer les pauvres dans la rue. La Seine gelait, les trottoirs glaçaient les pieds à travers les semelles des bottines ; le monde semblait sur le point de crever.

8.

Tenía yo entonces entre manos una obra urgente y rehusé todas las invitaciones que me fueron hechas para celebrar la Nochebuena, prefiriendo pasar la noche delante de mi mesa de trabajo. Comí solo y volví a mi tarea. Pero hacia las diez, el ruido de las calles, que a pesar de mis preocupaciones percibía, y los preparativos de cena que se advertían en la vecindad, me agitaron. No sabía lo que hacía. Escribía cien disparates y comprendí que no haría cosa de provecho en aquella noche. 

J'avais alors un gros travail en train et je refusai toute invitation pour le réveillon, préférant passer la nuit devant une table. Je dînai seul ; puis je me mis à l'oeuvre. Mais voilà que, vers dix heures, la pensée de la gaieté courant Paris, le bruit des rues qui me parvenait malgré tout, les préparatifs de souper de mes voisins, entendus à travers les cloisons, m'agitèrent. Je ne savais plus ce que je faisais ; j'écrivais des bêtises ; et je compris qu'il fallait renoncer à l'espoir de produire quelque chose de bon cette nuit-là.

9.

Daba grandes paseos por mi cuarto; me sentaba, me levantaba; indudablemente sufría la misteriosa influencia de la alegría de fuera, y me resigné. 

Je marchai un peu à travers ma chambre. Je m'assis, je me relevai. Je subissais, certes, la mystérieuse influence de la joie du dehors, et je me résignai. 

10.

Llamé a mi muchacha y le dije: —Ángela, vaya usted a buscar cena para dos; ostras, una perdiz y cangrejos, jamón y pasteles. Traiga usted también dos botellas de champaña; ponga dos cubiertos y acuéstese usted.

Je sonnai ma bonne et je lui dis : "Angèle, allez m'acheter de quoi souper à deux : des huîtres, un perdreau froid, des écrevisses, du jambon, des gâteaux. Montez-moi deux bouteilles de champagne : mettez le couvert et couchez-vous."

11.

Obedeció un poco sorprendida. Cuando todo estuvo preparado me puse el abrigo y salí.

Elle obéit, un peu surprise. Quand tout fut prêt, j'endossai mon pardessus, et je sortis.

12.

Quedaba una gran cuestión que resolver. ¿Con quién celebraría mi Nochebuena? Mis amigos estarían todos invitados. Para contar con uno hubiera sido necesario comprometerle anticipadamente. Entonces pensé en realizar una buena acción al mismo tiempo que me procuraba compañía. Y me dije: "París está lleno de hermosas y pobres jóvenes que no tienen cena esta noche y que andan errantes en busca de un muchacho generoso. Yo seré la Providencia de Navidad para una de esas desheredadas. 

Une grosse question restait à résoudre : Avec qui allais-je réveillonner ? Mes amies étaient invitées partout. Pour en avoir une, il aurait fallu m'y prendre d'avance. Alors, je songeai à faire en même temps une bonne action. Je me dis : Paris est plein de pauvres et belles filles qui n'ont pas un souper sur la planche, et qui errent en quête d'un garçon généreux. Je veux être la Providence de Noël d'une de ces déshéritées.

13.

Voy a corretear un poco por las calles, entraré en los lugares del placer, preguntaré, ojearé y escogeré a mi gusto.

Je vais rôder, entrer dans les lieux de plaisir, questionner, chasser, choisir à mon gré.

14.

Y empecé a recorrer la ciudad. 

Et je me mis à parcourir la ville.

15.

Desde luego, encontré gran número de muchachas infelices que buscaban aventura, pero unas eran feas hasta proporcionar una indigestión, y otras tan delgadas que podían quebrarse por los pies si se tropezaban. 

Certes, je rencontrai beaucoup de pauvres filles cherchant aventure, mais elles étaient laides à donner une indigestion, ou maigres à geler sur pied si elles s'étaient arrêtées.

16.

Yo soy débil, ya lo sabéis. Adoro a las mujeres llenitas. Cuanto más metidas en carnes, más me gustan. 

J'ai un faible, vous le savez, j'aime les femmes nourries. Plus elles sont en chair, plus je les préfère.. Une colosse me fait perdre la raison.

17.

De pronto, cerca del teatro de Variedades, descubro un perfil que me agrada. Una cabeza hermosa y dos curvas atractivas: la del pecho, muy bella; la de más abajo, sorprendente. Una barriga de pato gordo. Me quedaba un punto que esclarecer: el rostro.

Soudain, en face du théâtre des Variétés, j'aperçus un profil à mon gré. Une tête, puis, par-devant, deux bosses, celle de la poitrine, fort belle, celle du dessous surprenante : un ventre d'oie grasse. J'en frissonnai, murmurant : "Sacristi, la belle fille !" Un point me restait à éclaircir : le visage.

18.

El rostro es el postre; y el resto, el asado. 

Le visage, c'est le dessert ; le reste c'est... c'est le rôti.

19.

Apreté el paso. Era encantadora, muy joven, morena y con grandes ojos negros. 

Je hâtai le pas, je rejoignis cette femme errante, et , sous un bec de gaz, je me retournai brusquement. Elle était charmante, toute jeune, brune, avec de grands yeux noirs.

20.

Le hice mi proposición, que aceptó sin vacilar. 

Je fis ma proposition qu'elle accepta sans hésitation.

21.

Un cuarto de hora después estábamos sentados a la mesa en el comedor de mi casa.

Un quart d'heure plus tard, nous étions attablés dans mon appartement.

22.

Al entrar exclamó: —¡Ah, qué bien se está aquí!

Elle dit en entrant : "Ah ! on est bien ici."

23.

Y miraba alrededor con la satisfacción visible de haber encontrado habitación y mesa en aquella noche glacial. Era una mujer arrogante y gruesa. 

Et elle regarda autour d'elle avec la satisfaction visible d'avoir trouvé la table et le gîte en cette nuit glaciale. Elle était superbe, tellement jolie qu'elle m'étonnait, et grosse à ravir mon coeur pour toujours.

24.

Se quitó el abrigo y el sombrero. Se sentó y se puso a comer; pero no parecía del todo bien dispuesta. De cuando en cuando, su cara, un poco pálida, se alteraba como si sufriese un dolor oculto. 

Elle ôta son manteau, son chapeau, s'assit et se mit à manger ; mais elle ne paraissait pas en train, et parfois sa figure un peu pâle tressaillait comme si elle eût souffert d'un chagrin caché.

25.

Le pregunté:—¿Tienes algún disgusto?, ¿te pasa algo?

Je lui demandai: "Tu as des embêtements ?"

26.

Me contestó:—¡Bah! Olvidémonos de todo.

Elle répondit : "Bah ! oublions tout."

27.

Empezó a beber. Vaciaba de un sorbo su vaso de champaña y lo llenaba sin cesar. 

Et elle se mit à boire. Elle vidait d'un trait son verre de champagne, le remplissait et le revidait encore, sans cesse.

28.

Bien pronto empezó a ponerse encarnada y a reír locamente. 

Bientôt un peu de rougeur lui vint aux joues ; et elle commença à rire.

29.

Yo la adoraba ya. La besaba apasionadamente y descubrí que no era vulgar ni grosera.

Moi, je l'adorais déjà, l'embrassant à pleine bouche, découvrant qu'elle n'était ni bête, ni commune, ni grossière comme les filles du trottoir. Je lui demandai des détails sur sa vie. Elle répondit : "Mon petit, cela ne te regarde pas !"

30.

Pero, una hora más tarde...

Hélas ! une heure plus tard ...

31.

En fin: llegó el momento de acostarse, y mientras yo levantaba la mesa colocada delante de la chimenea, ella se desnudó vivamente y se deslizó entre las sábanas. 

Enfin, le moment vint de se mettre au lit, et, pendant que j'enlevais la table dressée devant le feu, elle se déshabilla hâtivement et se glissa sous les couvertures.

32.

Mis vecinos hacían un ruido infernal, riendo y cantando como locos, y yo pensaba: "He hecho bien en ir a buscar a esta hermosa muchacha. No habría sido posible trabajar de ningún modo.

Mes voisins faisaient un vacarme affreux, riant et chantant comme des fous ; et je me disais : "J'ai eu rudement raison d'aller chercher cette belle fille ; je n'aurai jamais pu travailler."

33.

Un quejido profundo me hizo volver la cabeza. —¿Qué tienes, querida? No respondió, pero siguió suspirando dolorosamente, como si sufriera de una manera horrible.

Un profond gémissement me fit retourner. Je demandai: "Qu'as-tu, ma chatte ?" Elle ne répondit pas, mais elle continuait à pousser des soupirs douloureux, comme si elle eût souffert horriblement.

34.

—¿Estás indispuesta? —le pregunté.

Je repris : "Est-ce que tu te trouves indisposée ?" Et soudain elle jeta un cri, un cri déchirant. Je me précipitai, une bougie à la main.

35.

Entonces lanzó un grito, un grito espantoso. Me precipité hacia ella con una bujía en la mano. Su fisonomía estaba descompuesta por el dolor. Se retorcía las manos y salían de su garganta gemidos sordos como el estertor de un agonizante. 

Son visage était décomposé par la douleur, et elle se tordait les mains, haletante, envoyant du fond de sa gorge ces sortes de gémissements sourds qui semblent des râles et qui font défaillir le coeur.

36.

Aturdido, yo le preguntaba: —¿Qué tienes?

Je demandai, éperdu : "Mais qu'as-tu ? dis-moi, qu'as-tu ?"

37.

No respondía y comenzó a dar alaridos. 

Elle ne répondit pas et se mit à hurler.

38.

De pronto, las vecinas callaron y se pusieron a escuchar lo que pasaba en mi habitación.

Tout à coup les voisins se turent, écoutant ce qui se passait chez moi.

39.

—¿Qué tienes? Dímelo —repetía yo—. ¿Qué te duele?

Je répétais : "Où souffres-tu, dis-moi, où souffres-tu ?"

40.

Entonces balbuceó: —¡Oh, mi vientre, mi vientre! Levanté sus ropas y vi…

Elle balbutia : "Oh ! mon ventre ! mon ventre !" D'un seul coup je relevai la couverture, et j'aperçus...

41.

Aquella mujer, amigos míos ¡estaba dando a luz!

Elle accouchait, mes amis.

42.

Entonces, con la cabeza perdida, fui hacia la pared de mi cuarto y empecé a dar puñetazos gritando con todas mis fuerzas: —¡Socorro, socorro!

Alors je perdis la tête ; je me précipitai sur le mur que je heurtai à coups de poing, de toute ma force, en vociférant : "Au secours, au secours !"

43.

La puerta se abrió y se precipitó en mi cuarto una multitud de hombres vestidos de frac, mujeres escotadas, pierrots, turcos, mosqueteros. Esta invasión me enloquecía de tal modo que no acertaba a encontrar una explicación. 

Ma porte s'ouvrit ; une foule se précipita chez moi, des hommes en habit, des femmes décolletées, des Pierrots, des Turcs, des Mousquetaires. Cette invasion m'affola tellement que je ne pouvais même plus m'expliquer.

44.

Temían un accidente grave, un crimen, quizá, y no me comprendían. 

Eux, ils avaient cru à quelque accident, à un crime peut-être, et ne comprenait plus.

45.

Yo pude decir al fin: —Es… es que está dando a luz.

Je dis enfin : "C'est... c'est... cette... cette femme qui... qui accouche."

46.

Entonces todos la examinaron, dando cada uno su opinión. Un capuchino, sobre todo, pretendía ser inteligente en el asunto y quería ayudar a la Naturaleza. 

Alors tout le monde l'examina, dit son avis. Un capucin surtout prétendait s'y connaître, et voulait aider la nature.

47.

Todos estaban más o menos borrachos y creo que la hubieran matado. Yo me precipité sin sombrero por la escalera para buscar un médico viejo que vivía cerca. 

Ils étaient gris comme des ânes. Je crus qu'ils allaient la tuer ; et je me précipitai, nu-tête, dans l'escalier, pour chercher un vieux médecin qui habitait dans une rue voisine.

48.

Cuando volví con el médico, los vecinos de todos los pisos ocupaban mi habitación. Cuatro desahogados, sentados a la mesa, concluían con mis cangrejos y mi champaña.

Quand je revins avec le docteur, toute ma maison était debout ; on avait rallumé le gaz de l'escalier ; les habitants de tous les étages occupaient mon appartement ; quatre débardeurs attablés achevaient mon champagne et mes écrevisses.

49.

A mi llegada, oí un grito formidable y una lechera me presentó sobre una tabla un pedazo de carne, arrugada y doblada, que gemía y maullaba como un gato. —Es una niña —me dijo.

A ma vue, un cri formidable éclata, et une laitière me présenta dans une serviette un affreux petit morceau de chair ridée, plissée, geignante, miaulant comme un chat ; et elle me dit : "C'est une fille."

50.

El médico examinó a la recién parida, declarando que su estado era grave por haber sucedido el parto después de una cena, y se fue, anunciándome que mandaría a una enfermera y una nodriza. 

Le médecin examina l'accouchée, déclara douteux son état, l'accident ayant eu lieu immédiatement après un souper, et il partit en annonçant qu'il allait m'envoyer immédiatement une garde-malade et une nourrice.

51.

Las dos mujeres llegaron una hora después, trayendo un paquete de medicamentos. 

Les deux femmes arrivèrent une heure après, apportant un paquet de médicaments.

52.

Yo pasé la noche en una butaca, demasiado aturdido para poder reflexionar sobre las consecuencias del lance.

Je passai la nuit dans un fauteuil, trop éperdu pour réfléchir aux suites.

53.

Volvió el médico por la mañana y halló bastante mal a la enferma.

Dès le matin, le médecin revint. Il trouva la malade assez mal.

54.

—Su mujer de usted —me dijo.

Il me dit : "Votre femme, monsieur..."

55.

—No es mi mujer —le interrumpí.

Je l'interrompis : "Ce n'est pas ma femme."

56.

—O su querida, poco me importa —y siguió enumerando los cuidados, los medicamentos y el régimen que necesitaba.

Il reprit : "Votre maîtresse, peu m'importe." Et il énuméra les soins qu'il lui fallait, le régime, les remèdes.

57.

¿Qué hacer? Enviar a esa desgraciada al hospital hubiera significado aparecer a los ojos de toda la vecindad, del barrio entero, como un desalmado. 

Que faire ? Envoyer cette malheureuse à l'hôpital ? J'aurais passé pour un manant dans toute la maison, dans tout le quartier.

58.

La retuve en mi casa y estuvo seis semanas enferma en mi misma cama.

Je la gardai. Elle resta dans mon lit six semaines.

59.

¿El niño? Lo di a criar en un pueblo cercano. Me cuesta cincuenta pesetas al mes y, habiendo pagado hasta hoy, me veo obligado a pagar hasta que me muera. 

L'enfant ? Je l'envoyai chez des paysans de Poissy. Il me coûte encore cinquante francs par mois. Ayant payé dans le début, me voici forcé de payer jusqu'à ma mort.

60.

Cuando tenga criterio para comprender, supondrá que soy su padre.

Et, plus tard, il me croira son père.

61.

Y para colmo de desdichas, cuando estuvo curada…, me quería, me quería con delirio la muy…

Mais, pour comble de malheur, quand la fille a été guérie... elle m'aimait... elle m'aimait éperdument, la gueuse !

62.

Y bien...?

- Eh bien ?

63.

Pero se puso delgada como un gato hambriento. Y me paso el día huyendo de la maldita, que parece un esqueleto, y me aguarda en las calles, se esconde para verme pasar, me detiene de noche cuando salgo, para besarme la mano, me aburre y me vuelve loco. Ya sabéis por qué no celebraré nunca la Nochebuena.»

- Eh bien, elle était devenue maigre comme un chat de gouttières ; et j'ai flanqué dehors cette carcasse qui me guette dans la rue, se cache pour me voir passer, m'arrête le soir quand je sors, pour me baiser la main, m'embête enfin à me rendre fou.

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