No puedo dormir. Mi insomnio feliz palpita, alegre, y adivino, con tu inmovilidad, el mismo abatimiento tembloroso... Tú no te mueves. Tú esperas que yo me duerma. Tu brazo se aprieta, a veces, en torno de mí por tierna costumbre, y tus pies encantadores se entrelazan con los míos... El sueño se acerca, me roza y huye... ¡Lo veo! Es semejante a esa mariposa de pesado terciopelo que yo perseguía en el jardín inflamado de iris... ¿Recuerdas? ¡Qué luz, qué impaciente juventud exaltaba toda aquella jornada...! Una brisa ácida y apresurada lanzaba sobre el sol una humareda de nubes rápidas, ajaba al paso las hojas demasiado tiernas de los tilos, y las flores del nogal caían convertidas en orugas enrojecidas sobre nuestros cabellos, con las flores de las paulonias, de un morado lluvioso de cielo parisiense... Los brotes de las grosellas que tú magullabas, la acedera salvaje en forma de rosa en medio del césped, la menta tierna del todo, todavía morena, la salvia vellosa como una oreja de liebre, todo desbordaba un jugo fuerte y pimentado, del que mezclaba en mis labios el gusto de alcohol y de licor de limón.
Je ne puis dormir. Mon insomnie heureuse palpite allègre, et je devine, en ton immobilité, le même accablement frémissant... Tu ne bouges pas. Tu espères que je dors. Ton bras se resserre parfois autour de moi, par tendre habitude, et tes pieds charmants s'enlacent au miens... Le sommeil s'approche, me frôle et fuit... Je le vois ! Il est pareil à ce papillon de lourd velours que poursuivais, dans le jardin enflammé d'iris... Tu te souviens ? Quelle lumière, quelle jeunesse impatiente exaltait toute cette journée !... Une brise acide et pressée jetait sur le soleil une fumée de nuages rapides, fanait en passant les feuilles trop tendres des tilleuls, et les fleurs du noyer tombaient en chenilles roussies sur nos cheveux, avec les fleurs des paulownias, d'un mauve pluvieux de ciel parisien... Les pousses des cassis que tu froissais, l'oseille sauvage en rosace parmi le gazon, la menthe toute jeune, encore brune, la sauge duvetée comme une oreille de lièvre - tout débordait d'un suc énergique et poivré, dont je mêlais sur mes lèvres le goût d'alcool et de citronnelle...