Es dudoso que Su Alteza haya dado jamás una audiencia tan larga a un simple mortal, y yo temía abusar de ello. Finalmente, cuando el alba estremecida empezaba a aclarar las ventanas, el célebre personaje, cantado por tantos poetas y servido por tantos filósofos que trabajan en su gloria sin saberlo, me dijo que usted guarde de mí un buen recuerdo, y quiero probarle que yo, de quien se habla tan mal, algunas veces soy un buen diablo, para servirme de una de sus locuciones vulgares. A fin de compensar la pérdida irremediable que usted ha hecho de su alma, le doy la puesta que habría ganado si la suerte hubiera estado de su parte, es decir, la posibilidad de aliviar y vencer, durante toda su vida, esa extraña afección del Aburrimiento, que es la fuente de todas sus enfermedades y de todos sus miserables progresos. Nunca se creará en usted un deseo que yo no ayude a realizar; reinará sobre sus vulgares semejantes; estará abastecido de halagos y hasta de adoraciones; el dinero, el oro, los diamantes, los palacios fantásticos, vendrán a buscarlo y le pedirán que los acepte, sin que usted haya hecho algún esfuerzo para ganarlos; cambiará de patria y de región tan rápido como su fantasía se lo ordene; se embriagará de voluptuosidad, sin hastiarse, en países encantados donde siempre hace calor y donde las mujeres huelen tan bien como las flores, etc., etc. — agregó levantándose y despidiéndome con una buena sonrisa.
Il est douteux que Son Altesse ait jamais donné une si longue audience à un simple mortel, et je craignais d'abuser. Enfin, comme l'aube frissonnante blanchissait les vitres, ce célèbre personnage, chanté par tant de poètes et servi par tant de philosophes qui travaillent à sa gloire sans le savoir, me dit: "Je veux que vous gardiez de moi un bon souvenir, et vous prouver que Moi, dont on dit tant de mal, je suis quelquefois bon diable, pour me servir d'une de vos locutions vulgaires. Afin de compenser la perte irrémédiable que vous avez faite de votre âme, je vous donne l'enjeu que vous auriez gagné si le sort avait été pour vous, c'est-à-dire la possibilité de soulager et de vaincre, pendant toute votre vie, cette bizarre affection de l'Ennui, qui est la source de toutes vos maladies et de tous vos misérables progrès. Jamais un désir ne sera formé par vous, que je ne vous aide à le réaliser; vous régnerez sur vos vulgaires semblables; vous serez fourni de flatteries et même d'adorations; l'argent, l'or, les diamants, les palais féeriques, viendront vous chercher et vous prieront de les accepter, sans que vous ayez fait un effort pour les gagner; vous changerez de patrie et de contrée aussi souvent que votre fantaisie vous l'ordonnera; vous vous soûlerez de voluptés, sans lassitude, dans des pays charmants où il fait toujours chaud et où les femmes sentent aussi bon que les fleurs, - et caetera, et caetera...", ajouta-t-il en se levant et en me congédiant avec un bon sourire.