Los hermanos Van-Buck / Les frères Van - Alfred de Musset
1.

En una ciudad alemana, no lejos de las orillas del Rin, vivían los dos hermanos Van-Buck, que pasaban por ser, y con razón, dos diestros grabadores.

Dans une ville allemande, non loin des bords du Rhin, vivaient les deux frères Van-Buck, qui passaient avec raison pour deux habiles graveurs.

2.

Tenían por costumbre ir casi todas las noches, después de cenar, a casa de un viejo orfebre, vecino suyo; aquel buen hombre, cuyo nombre era Thomas Heermans, los recibía en su trastienda, junto a la chimenea y con una gran pipa en los labios; las veladas, que pasaban solos los tres, no eran demasiado animadas; los dos hermanos eran de un temperamento bastante taciturno, y por lo que se refiere al orfebre, aunque tenía un ojo despierto, era raro que los trabajos a los que se consagraba día y noche no lo preocuparan hasta el punto de volverlo algo distraído y poco hablador.

Ils avaient l'habitude d'aller presque tous les soirs, après dîner, chez un vieil orfèvre, leur voisin; ce brave homme, dont le nom est Thomas Heermans, les recevait dans son arrière-boutique, au coin de son feu, et sa grande pipe à la bouche; leurs soirées, qui se passaient entre eux trois seulement, n'étaient pas fort animées; les deux frères étaient d'un naturel assez taciturne, et pour l'orfèvre, bien qu'il eût l'œil vif, il était rare que les travaux auxquels il s'adonnait jour et nuit ne le préoccupassent pas au point de le rendre presque distrait et tout au moins fort peu bavard.

3.

Sin embargo, se entendían y se apreciaban más precisamente por la similitud de su talante; era muy raro que al pasar por delante de la tienda de Heermans por la noche, no se viera a través de los cristales las cabezas de los tres amigos alrededor de una lámpara y, en la mayoría de ocasiones, una gran jarra de cerveza.

Cependant ils se convenaient, et ne s'en aimaient que mieux, à cause de leur conformité d'humeur; il était bien rare qu'en passant auprès de la boutique d'Heermans, le soir, on n'aperçût pas à travers les vitres les têtes des trois amis autour d'une lampe, et, la plupart du temps, d'un grand pot de bière.

4.

Una noche, no hace mucho tiempo, el viejo Heermans se mostró más alegre de lo habitual.

Un soir (il y a peu de temps de cela), le vieux Heermans se montra plus gai qu'à l'ordinaire.

5.

-¿Qué le ocurre, pues? -le dijeron los grabadores- tiene una noticia feliz escrita en la cara.

- Qu'avez-vous donc? lui dirent les graveurs; il y a, parbleu! une joyeuse nouvelle écrite sur votre figure.

6.

-Hijos míos, -contestó el buen orfebre- mi hija sale mañana del convento, su educación ha concluido, y me ven mis dignos amigos, mis queridos vecinos, con una alegría tal que me dan ganas de bailar sobre una mesa.

- Mes enfants, répliqua le bon orfèvre, ma fille sort demain du couvent: son éducation est terminée, et vous m'en voyez, ô mes dignes amis, mes chers voisins, dans une joie qui me donne des envies de danser sur ma table.

7.

Hay que señalar que el bueno de Heermans había apreciado siempre a los religiosos lo mismo que a la peste. Pero una anciana hermana, rica y piadosa, había exigido que su sobrina estudiara en un colegio de religiosas y el prudente calculador había tenido que aceptar aunque de mala gana.

Il faut remarquer que l'honnête Heermans avait toujours aimé les ecclésiastiques à l'égal de la peste. Mais une vieille sœur, riche et dévote, avait exigé le couvent pour sa nièce et le sage calculateur y avait consenti à regret.

8.

-Sí, amigos míos, ya la verán, ¡estoy ansioso por pellizcarle las mejillas!

- Oui, mes enfants, et vous la verrez; il me tarde de lui pincer les joues!

9.

Los grabadores le dieron la mano afectuosamente, y emplearon el resto de la velada en hablar de la señorita Wilhelmine. ¡Qué bella debía estar! Aquel día, la jarra de cerveza fue reemplazada por una botella de calidad y acordaron que, por supuesto, los dos vecinos vendrían a cenar al día siguiente.

Les graveurs lui serrèrent la main affectueusement, et le reste de la soirée fut employé à parler de Mlle Wilhelmine; comme elle sera embellie! Le pot de bière fut remplacé ce jour-là par une bouteille bien cachetée; bien entendu que les deux voisins viendraient dîner le lendemain.

10.

No se les ocurrió faltar; con sus ropas de los domingos, a la caída del sol se dirigieron a casa de su viejo amigo, y se sentaron a la mesa casi de inmediato. Apenas Thomas Heermans golpeó la mesa con una intensidad capaz de romper los vasos para demostrar su buen humor, la jovencita, con un andar tímido y los codos pegados al cuerpo, fue a sentarse entre los dos jóvenes, ruborizada.

Ils n'eurent garde d'y manquer; revêtus de leur habit des dimanches, ils se rendirent, au coucher du soleil, chez leur vieil ami, et l'on se mit à table presque aussitôt. À peine Thomas Heermans eut-il frappé sur la table de manière à casser les verres, afin de témoigner sa belle humeur, que la jeune fille, avec une démarche timide, et les coudes serrés contre le corps, vint s'asseoir en rougissant entre les deux jeunes gens.

11.

Pese a los esfuerzos del orfebre, la cena fue más bien silenciosa; él mismo, tras haber agotado su inicial alegría, se vio obligado a mirar a su querida hija sonriendo; los grabadores conservaban un frío comedimiento y no intercambiaron entre ellos ni una sola mirada. Por la noche, cuando regresaron a su casa, se metieron en la cama sin decir ni palabra, en contra de su costumbre que era la de charlar acerca de los acontecimientos o del trabajo del día, e incluso, dado que dormían en la misma habitación, prolongar la conversación hasta bastante tarde.

Mais le dîner, en dépit des efforts de l'orfèvre, fut silencieux; lui-même, après avoir épuisé sa première gaieté, fut obligé de se contenter de regarder sa chère fille en souriant; les graveurs gardaient une contenance froide et n'échangeaient pas entre eux un seul regard. Le soir, lorsqu'ils rentrèrent chez eux, ils se mirent au lit sans dire une parole, contre leur habitude qui était de causer sur les événements ou le travail de la journée, et même, comme ils couchaient dans la même chambre, de prolonger leur conversation fort avant dans la nuit.

12.

Los dos hermanos se querían mucho; se les veía siempre juntos, en el paseo, en las fiestas, en la caza que les gustaba bastante. Tenían un talento similar y, a veces, el trabajo de uno era firmado por el otro. Además, habríase dicho que el rostro del segundo había sido esculpido copiando el de su hermano; nunca se había visto una unión más hermosa bajo el cielo. Era por lo tanto bastante extraño que parecieran evitar hablarse, incluso mirarse; su conducta había mortificado a su buen vecino; de todas maneras, la noche transcurrió así, aunque cada uno de ellos puedo percatarse de que el otro no dormía; la luna iluminaba la habitación, y a cada instante se removían suspirando. Era evidente que los dos habían recibido simultáneamente un golpe profundo: se habían enamorado de Wilhelmine.

Les deux frères Van-Buck s'aimaient tendrement; on les voyait partout ensemble: à la promenade, aux fêtes, à la chasse qu'ils aimaient beaucoup. Ils avaient le même talent, et l'ouvrage de l'un était quelquefois signé par l'autre. D'ailleurs, on eût dit que le visage du second était sculpté sur celui de son frère; jamais plus belle union ne s'était vue sous le ciel. Il était donc très étonnant qu'ils semblassent éviter de se parler et même de se regarder; leur conduite avait mortifié leur bon voisin; toutefois leur nuit se passa ainsi, bien que chacun d'eux pût s'apercevoir que l'autre ne dormait point; la lune éclairait leur chambre, et à tout moment ils s'agitaient en soupirant. Il était évident que tous deux avaient reçu en même temps un coup profond: ils aimaient Wilhelmine.

13.

Una semana entera transcurrió sin que se dieran ni una sola vez la mano; un silencio contumaz reinó en su taller e inclinados sobre la plancha de cobre, ninguno de los dos volvió un instante la cabeza.

Une semaine entière suivit, pendant laquelle ils ne se serrèrent pas une fois la main; un silence opiniâtre régna dans leur atelier, et chacun, courbé sur sa planche de cuivre, ne détourna pas la tête un seul instant.

14.

El último día de esta triste semana, el viejo Heermans estaba sentado junto a su puerta, frente a su hija.

Le dernier jour de cette triste semaine, le vieux Heermans était assis sur le pas de sa porte, en face de sa fille.

15.

-Padre, ¿no me había dicho usted que veríamos a los hermanos Van-Buck todas las noches?

- Ne m'aviez-vous pas dit, mon cher père, que nous verrions les deux Van-Buck tous les soirs?

16.

-¡Pues sí! -contestó el orfebre- es verdad que no han aparecido por aquí desde hace ocho días; es algo raro.

- Hélas! répondit l'orfèvre, il est vrai qu'ils n'ont point paru de ce côté depuis huit jours; cela est bien singulier.

17.

-¿Entonces soy yo la causa de su ausencia? -dijo Wilhelmine-. Han dejado de venir a partir del momento en que llegué.

- Est-ce donc moi qui en suis cause? dit Wilhelmine; c'est depuis mon arrivée qu'ils ont cessé de venir.

18.

Al oír estas palabras ingenuamente pronunciadas, el anciano inclinó la cabeza y permaneció bastante rato sin hablar.

À ces paroles prononcées naïvement, le vieillard baissa la tête et demeura longtemps sans parler.

19.

-¡Oh, hija mía! ¡Oh, mi querida hija! -exclamó al fin mientras posaba los labios marchitos sobre la mano regordeta y fresca de su hija-. Es probable que los curas te hayan enseñado a detestar el amor, pero ¿te han enseñado cómo se le puede hacer frente? ¿No olvidarás a tu viejo padre una bella noche de verano?

- ô ma fille! ô ma chère fille! s'écria-t-il enfin, en pressant de ses lèvres flétries la main potelée et fraîche de son enfant. Ces moines t'ont appris sans doute à détester l'amour; mais t'ont-ils appris comment on lui résiste? ô Dieu! n'oublieras-tu pas ton vieux père dans quelque belle nuit d'été?

20.

Por toda respuesta, Wilhelmine sacudió la cabeza sonriendo.

Wilhelmine, pour toute réponse, secoua la tête en souriant.

21.

-Tu sonrisa es muy dulce, mi pequeño ángel; es dulce como la miel. ¡Quiera Dios que no se cambie jamás en lágrimas!

- Ton sourire est bien doux, mon petit ange; il est doux comme le miel; Dieu veuille qu'il ne se change jamais en larmes!

22.

-¡Oh! padre, ¿me considera tan bella como para ser tan desgraciada?

- Hélas! mon père, me croyez-vous si belle pour devoir être si malheureuse?

23.

En aquel momento, los dos grabadores aparecieron ante él, después de que Wilhelmine se hubiera retirado modestamente al verlos acercarse.

En ce moment, les deux graveurs parurent devant lui, après que Wilhelmine se fut retirée modestement à leur approche.

24.

-Hemos visto a tu hija, Heermans, y los dos hemos perdido la paz; nuestros sueños nos traicionan, háblanos con franqueza. ¿Aceptarías a alguno de los dos como yerno? Entonces pregúntale cuál es el que ella prefiere y, sea el que sea, será su esposa legítima. Nuestros talleres están repletos de obreros como los tuyos, nuestra clientela es magnífica. Tu verás lo que decides.

- Nous avons vu ta fille, Heermans, et nous avons perdu tous deux le sommeil: nos rêves nous trahissent l'un à l'autre; parle-nous franchement. Veux-tu de l'un de nous pour ton gendre? Alors demande-lui qui elle préfère, et, quel qu'il soit, elle deviendra sa femme légitime. Nos ateliers sont remplis d'ouvriers aussi nombreux que les tiens; notre clientèle est magnifique. Vois ce que tu décides.

25.

El orfebre les tendió las dos manos.

L'orfèvre leur tendit ses deux mains.

26.

-Les pido tres días -dijo-. ¿Es demasiado? Veo bien que están enamorados.

- Je vous demande trois jours, dit-il, est-ce trop? Vous êtes amoureux, je le vois.

27.

-Es cierto -contestaron los grabadores-; amamos a tu hija, pero no debes dejarnos amarla sin esperanza.

- Il est vrai, répondirent les graveurs; nous aimons ta fille, et il ne faut pas nous laisser le temps de l'aimer sans espoir de guérison.

28.

Por la noche, la joven apenas se atrevió a levantar los ojos; sabía que debía elegir. A la mañana siguiente, el viejo Heermans envió a los dos hermanos una carta concebida en estos términos:

Le soir, à peine la jeune fille osa-t-elle lever les yeux; elle savait qu'elle devait choisir. Le lendemain, le vieil Heermans envoya aux deux frères une lettre ainsi conçue:

29.

«Mi hija los ha visto a los dos; amará a Tristán como esposo y a Henri como hermano. ¡Ojalá sea recibido este deseo, que le he arrancado con esfuerzo, como debe serlo! Los espera el viejo amigo de ustedes, para estrechar entre sus brazos a toda su familia.»

«Ma fille vous a vus tous deux; elle chérira Tristan comme un époux et Henri comme un frère. Puisse cet aveu, que je lui arrache avec peine, être reçu par vous comme il doit l'être! Votre vieil ami vous attend pour serrer dans ses bras sa famille tout entière.»

30.

Aquellos nobles corazones habían convenido que una vez que uno fuera aceptado, el otro se callaría para siempre. ¡Ay! así son los pactos que uno hace antes de conocer su destino. Henri, que había cogido la carta del orfebre para leerla, no pudo terminarla; la dejó sobre la mesa y, pálido como la nieve, se derrumbó sobre su taburete.

Ces nobles coeurs étaient convenus entre eux que, l'un accepté, l'autre se tairait à jamais. Hélas! tels sont les pactes que l'on fait avant de connaître son sort. Henri, qui avait pris la lettre de l'orfèvre pour la lire, ne put l'achever; il la posa sur la table, et, pâle comme la neige, il tomba sur son escabeau.

31.

Sin embargo, siguieron viviendo juntos en buena armonía. Iban, como de costumbre, todas las noches a casa del orfebre; el feliz prometido cortejaba a su novia; Henri se esforzaba por mostrarse alegre, y sólo su palidez desmentía la calma que aparentaba.

Cependant ils continuèrent à vivre ensemble en bonne intelligence. Ils se rendaient même comme de coutume tous les soirs chez l'orfèvre; l'heureux fiancé y faisait la cour à sa prétendue; Henri lui-même s'efforçait de témoigner de la joie, et sa pâleur seule démentait le calme qu'il affectait.

32.

Un día que los dos hermanos se encontraban cazando, se detuvieron en un claro del bosque; cansados de andar, se tendieron sobre la hierba.

Un jour que les deux frères étaient à la chasse, ils s'arrêtèrent dans la clairière d'un bois; fatigués de leur marche, ils s'étendirent sur le gazon.

33.

-Tristán, -dijo Henri Van-Buck- hace tiempo que guardo silencio; pero necesito abrirte mi alma. Me resulta imposible permitir que te cases con la hija del orfebre.

- Tristan, dit Henri Van-Buck, voilà assez longtemps que je me tais; il faut que je t'ouvre mon âme. Il m'est impossible de te laisser épouser la fille de cet orfèvre.

34.

-Hermano -respondió Tristán- ¿así respetas las leyes del honor?

- Mon frère, répondit Tristan, est-ce ainsi que vous vous souvenez des lois de l'honneur?

35.

-Sé que infrinjo esas leyes; lo he pensado mucho antes de hablar contigo, pero mírame bien: siento que me estoy muriendo, aunque la poca sangre que me queda en las venas me corroe como el fuego.

- Je sais que je manque à ces lois; j'y ai réfléchi longtemps avant de vous en parler; mais regardez-moi: je ne vis plus; je me sens m'en aller, et cependant le peu de sang que j'ai dans les veines me ronge comme du feu.

36.

-Ya lo veo- contestó Tristán- ¿crees que no sufro al verte reducido a esta situación? Yo también he perdido toda mi alegría, pero ¿qué remedio hay?

- Je le vois, répondit Tristan; croyez-vous que je n'endure pas de grandes douleurs à vous réduire à cette extrémité? Hélas! j'en perds aussi toute ma joie; mais quel remède?

37.

-Ninguno, hermano; sólo quiero una cosa de ti y te suplico que me la concedas. No te cases con esa chica hasta que yo haya muerto.

- Aucun, mon frère; je ne veux de vous qu'une chose, et je vous supplie de me l'accorder. N'épousez pas cette jeune fille avant que je ne sois mort.

38.

-¡Muerto! -exclamó el otro.

- Mort! s'écria l'autre.

39.

-Sí, mi querido Tristán, es necesario. Te ruego encarecidamente que me des tu palabra, pues si tuviera que firmar tu contrato…

- Oui, mon cher Tristan, il le faut. Je vous conjure de m'en donner votre parole, car s'il me fallait signer votre contrat...

40.

-No, hermano, es imposible que mueras de desesperación. ¿Quieres que te prometa una cosa que me hiela el corazón sólo de pensarla?

- Non, mon frère, il est impossible que vous mouriez ainsi de votre désespoir; voulez-vous que je vous promette une chose qui me glace le cœur en y pensant?

41.

Mientras pronunciaba estas palabras, Tristán miró a su hermano y vio la palidez de la muerte en sus labios.

En disant ces paroles, Tristan regarda son frère; il vit la pâleur du trépas sur ses lèvres.

42.

-Mi querido Henri -exclamó- antes de verte morir así soy capaz de cederte mis derechos. Cásate con ella, te lo ruego; yo me iré a Estados Unidos.

- Mon cher Henri, s'écria-t-il, plutôt que de vous laisser ainsi périr, je vous céderai mes droits. Épousez-la, je vous en prie; je passerai aux États-Unis.

43.

-¡Que me case con ella! -dijo el otro-. Y al trasmitirme tus derechos me transmitirás también su amor? Hace falta que uno de los dos muera -añadió con voz lúgubre, mientras su mano temblaba y se golpeaba con el mango de su cuchillo de caza.

- Que je l'épouse! s'écria l'autre. Me transmettrez-vous son amour en me transmettant vos droits? Il faut pourtant que l'un de nous deux en meure, ajouta-t-il d'une voix sombre. Sa main tremblait et battait contre la poignée de son couteau de chasse.

44.

-Sí, -contestó Tristán. 

- Oui, répondit Tristan.

45.

Y ambos se levantaron automáticamente.

Ils se levèrent machinalement tous deux.

46.

-No veo nada más que un camino -dijo Henri.

- Je ne vois qu'un moyen, dit Henri.

47.

Ambos sacaron sus cuchillos y se pusieron en guardia. Pero, acostumbrados a ejercitarse juntos y conociendo todos sus golpes, no se alcanzaban sino raramente. Durante una hora entera se lanzaron golpes furiosos, y de vez en cuando descansaban pues se encontraban agotados y con grandes heridas en los costados.

Tous deux tirèrent leur couteau et se mirent en garde. Mais, accoutumés à faire des armes ensemble, et connaissant tous leurs coups, ils ne pouvaient s'atteindre que rarement. Pendant une heure entière ils se portèrent des coups furieux, et de temps en temps ils se reposaient, épuisés de fatigue et les flancs ouverts par de larges blessures.

48.

Durante una de esas pausas, oyeron los tambores que advertían a los ciudadanos que debían volver a la ciudad. Era la hora en la que, en tantas ocasiones, habían regresado juntos, cogidos del brazo, tristes o alegres, con los pies cubiertos de polvo; y se contaban sus más secretos pensamientos. Toda su juventud pasó ante sus ojos en aquel momento.

Pendant l'une de ces pauses, ils entendirent les tambours avertir les citoyens de rentrer dans la ville. C'était l'heure où, tant de fois, ils étaient revenus ensemble, en se tenant le bras, tristes ou gais, les pieds couverts de poussière; ils s'entretenaient alors de leurs plus secrètes pensées. Toute leur jeunesse se déroula devant eux en cet instant.

49.

El sol iba a desaparecer; sus últimos rayos se deslizaban entre los abetos descarnados, sobre un alcor cubierto de hojas secas. El rocío de la tarde curvaba la hierba, y los pájaros saludaban la noche.

Le soleil allait disparaître; ses derniers rayons glissaient entre les sapins décharnés, sur le tertre couvert de feuilles sèches. La rosée du soir faisait plier l'herbe, et les oiseaux saluaient la nuit.

50.

Tristán volvió la cabeza y vio en el valle los campanarios de su ciudad natal surgir entre la niebla. Sus entrañas se conmovieron y dio un paso hacia su hermano tendiéndole la mano. Pero una debilidad mortal se adueñó de su alma; se apoyó sobre un árbol; sus hombros resbalaron sobre la áspera corteza y cayó.

Tristan détourna la tête; il vit dans la vallée les clochers de la ville natale sortir du brouillard, et la rivière s'étendre sur la prairie comme une couleuvre blanche dans les herbes. Ses entrailles s'émurent, il fit un pas vers son frère en lui tendant la main. Mais une faiblesse mortelle lui saisit l'âme; il s'appuya sur un arbre; ses épaules glissèrent sur l'écorce raboteuse; il tomba.

51.

Henri contemplaba con horror los últimos esfuerzos de su hermano por aferrarse a la vida; le habría gustado acercarse a él, pero tampoco él podía moverse. Ahogado en su sangre, de pie e inmóvil, se tambaleaba como un hombre ebrio.

Henri contemplait avec horreur les derniers efforts de son frère pour ressaisir la vie; il eut voulu marcher vers lui, mais lui-même ne pouvait bouger. Noyé de sang, debout et immobile, il vacillait comme un homme ivre.

52.

Aquellos dos infortunados habían tenido una madre que los había amado tiernamente. Desde el fondo del valle, en el crepúsculo, una forma difusa pareció dibujarse de repente y dirigirse hacia ellos. Subía lentamente a la colina, y a medida que se acercaba, los hijos reconocían a su madre. En el momento en que el espectro pareció enteramente visible y reconocible, el que estaba de pie, haciendo un esfuerzo supremo, abandonó el lugar en el que estaba clavado, y fue a arrojarse en los brazos del que estaba en el suelo.

Ces deux infortunés avaient eu une mère qui les avait tendrement aimés. Du fond de la vallée, dans le crépuscule, une forme vague sembla tout à coup se détacher et s'avancer vers eux. Elle montait lentement la colline, et à mesure qu'elle approchait, les fils reconnaissaient leur mère. Au moment où le spectre parut entièrement visible et reconnaissable, celui qui était debout, par un suprême effort, quitta la place où il était cloué, et alla se jeter dans les bras de celui qui gisait à terre.

53.

Así, cubiertos de sangre y de lágrimas, expiraron los dos en un último abrazo.

Ainsi tous deux, couverts de sang et de larmes, expirèrent dans un dernier embrassement.

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1.

En una ciudad alemana, no lejos de las orillas del Rin, vivían los dos hermanos Van-Buck, que pasaban por ser, y con razón, dos diestros grabadores.

Dans une ville allemande, non loin des bords du Rhin, vivaient les deux frères Van-Buck, qui passaient avec raison pour deux habiles graveurs.

2.

Tenían por costumbre ir casi todas las noches, después de cenar, a casa de un viejo orfebre, vecino suyo; aquel buen hombre, cuyo nombre era Thomas Heermans, los recibía en su trastienda, junto a la chimenea y con una gran pipa en los labios; las veladas, que pasaban solos los tres, no eran demasiado animadas; los dos hermanos eran de un temperamento bastante taciturno, y por lo que se refiere al orfebre, aunque tenía un ojo despierto, era raro que los trabajos a los que se consagraba día y noche no lo preocuparan hasta el punto de volverlo algo distraído y poco hablador.

Ils avaient l'habitude d'aller presque tous les soirs, après dîner, chez un vieil orfèvre, leur voisin; ce brave homme, dont le nom est Thomas Heermans, les recevait dans son arrière-boutique, au coin de son feu, et sa grande pipe à la bouche; leurs soirées, qui se passaient entre eux trois seulement, n'étaient pas fort animées; les deux frères étaient d'un naturel assez taciturne, et pour l'orfèvre, bien qu'il eût l'œil vif, il était rare que les travaux auxquels il s'adonnait jour et nuit ne le préoccupassent pas au point de le rendre presque distrait et tout au moins fort peu bavard.

3.

Sin embargo, se entendían y se apreciaban más precisamente por la similitud de su talante; era muy raro que al pasar por delante de la tienda de Heermans por la noche, no se viera a través de los cristales las cabezas de los tres amigos alrededor de una lámpara y, en la mayoría de ocasiones, una gran jarra de cerveza.

Cependant ils se convenaient, et ne s'en aimaient que mieux, à cause de leur conformité d'humeur; il était bien rare qu'en passant auprès de la boutique d'Heermans, le soir, on n'aperçût pas à travers les vitres les têtes des trois amis autour d'une lampe, et, la plupart du temps, d'un grand pot de bière.

4.

Una noche, no hace mucho tiempo, el viejo Heermans se mostró más alegre de lo habitual.

Un soir (il y a peu de temps de cela), le vieux Heermans se montra plus gai qu'à l'ordinaire.

5.

-¿Qué le ocurre, pues? -le dijeron los grabadores- tiene una noticia feliz escrita en la cara.

- Qu'avez-vous donc? lui dirent les graveurs; il y a, parbleu! une joyeuse nouvelle écrite sur votre figure.

6.

-Hijos míos, -contestó el buen orfebre- mi hija sale mañana del convento, su educación ha concluido, y me ven mis dignos amigos, mis queridos vecinos, con una alegría tal que me dan ganas de bailar sobre una mesa.

- Mes enfants, répliqua le bon orfèvre, ma fille sort demain du couvent: son éducation est terminée, et vous m'en voyez, ô mes dignes amis, mes chers voisins, dans une joie qui me donne des envies de danser sur ma table.

7.

Hay que señalar que el bueno de Heermans había apreciado siempre a los religiosos lo mismo que a la peste. Pero una anciana hermana, rica y piadosa, había exigido que su sobrina estudiara en un colegio de religiosas y el prudente calculador había tenido que aceptar aunque de mala gana.

Il faut remarquer que l'honnête Heermans avait toujours aimé les ecclésiastiques à l'égal de la peste. Mais une vieille sœur, riche et dévote, avait exigé le couvent pour sa nièce et le sage calculateur y avait consenti à regret.

8.

-Sí, amigos míos, ya la verán, ¡estoy ansioso por pellizcarle las mejillas!

- Oui, mes enfants, et vous la verrez; il me tarde de lui pincer les joues!

9.

Los grabadores le dieron la mano afectuosamente, y emplearon el resto de la velada en hablar de la señorita Wilhelmine. ¡Qué bella debía estar! Aquel día, la jarra de cerveza fue reemplazada por una botella de calidad y acordaron que, por supuesto, los dos vecinos vendrían a cenar al día siguiente.

Les graveurs lui serrèrent la main affectueusement, et le reste de la soirée fut employé à parler de Mlle Wilhelmine; comme elle sera embellie! Le pot de bière fut remplacé ce jour-là par une bouteille bien cachetée; bien entendu que les deux voisins viendraient dîner le lendemain.

10.

No se les ocurrió faltar; con sus ropas de los domingos, a la caída del sol se dirigieron a casa de su viejo amigo, y se sentaron a la mesa casi de inmediato. Apenas Thomas Heermans golpeó la mesa con una intensidad capaz de romper los vasos para demostrar su buen humor, la jovencita, con un andar tímido y los codos pegados al cuerpo, fue a sentarse entre los dos jóvenes, ruborizada.

Ils n'eurent garde d'y manquer; revêtus de leur habit des dimanches, ils se rendirent, au coucher du soleil, chez leur vieil ami, et l'on se mit à table presque aussitôt. À peine Thomas Heermans eut-il frappé sur la table de manière à casser les verres, afin de témoigner sa belle humeur, que la jeune fille, avec une démarche timide, et les coudes serrés contre le corps, vint s'asseoir en rougissant entre les deux jeunes gens.

11.

Pese a los esfuerzos del orfebre, la cena fue más bien silenciosa; él mismo, tras haber agotado su inicial alegría, se vio obligado a mirar a su querida hija sonriendo; los grabadores conservaban un frío comedimiento y no intercambiaron entre ellos ni una sola mirada. Por la noche, cuando regresaron a su casa, se metieron en la cama sin decir ni palabra, en contra de su costumbre que era la de charlar acerca de los acontecimientos o del trabajo del día, e incluso, dado que dormían en la misma habitación, prolongar la conversación hasta bastante tarde.

Mais le dîner, en dépit des efforts de l'orfèvre, fut silencieux; lui-même, après avoir épuisé sa première gaieté, fut obligé de se contenter de regarder sa chère fille en souriant; les graveurs gardaient une contenance froide et n'échangeaient pas entre eux un seul regard. Le soir, lorsqu'ils rentrèrent chez eux, ils se mirent au lit sans dire une parole, contre leur habitude qui était de causer sur les événements ou le travail de la journée, et même, comme ils couchaient dans la même chambre, de prolonger leur conversation fort avant dans la nuit.

12.

Los dos hermanos se querían mucho; se les veía siempre juntos, en el paseo, en las fiestas, en la caza que les gustaba bastante. Tenían un talento similar y, a veces, el trabajo de uno era firmado por el otro. Además, habríase dicho que el rostro del segundo había sido esculpido copiando el de su hermano; nunca se había visto una unión más hermosa bajo el cielo. Era por lo tanto bastante extraño que parecieran evitar hablarse, incluso mirarse; su conducta había mortificado a su buen vecino; de todas maneras, la noche transcurrió así, aunque cada uno de ellos puedo percatarse de que el otro no dormía; la luna iluminaba la habitación, y a cada instante se removían suspirando. Era evidente que los dos habían recibido simultáneamente un golpe profundo: se habían enamorado de Wilhelmine.

Les deux frères Van-Buck s'aimaient tendrement; on les voyait partout ensemble: à la promenade, aux fêtes, à la chasse qu'ils aimaient beaucoup. Ils avaient le même talent, et l'ouvrage de l'un était quelquefois signé par l'autre. D'ailleurs, on eût dit que le visage du second était sculpté sur celui de son frère; jamais plus belle union ne s'était vue sous le ciel. Il était donc très étonnant qu'ils semblassent éviter de se parler et même de se regarder; leur conduite avait mortifié leur bon voisin; toutefois leur nuit se passa ainsi, bien que chacun d'eux pût s'apercevoir que l'autre ne dormait point; la lune éclairait leur chambre, et à tout moment ils s'agitaient en soupirant. Il était évident que tous deux avaient reçu en même temps un coup profond: ils aimaient Wilhelmine.

13.

Una semana entera transcurrió sin que se dieran ni una sola vez la mano; un silencio contumaz reinó en su taller e inclinados sobre la plancha de cobre, ninguno de los dos volvió un instante la cabeza.

Une semaine entière suivit, pendant laquelle ils ne se serrèrent pas une fois la main; un silence opiniâtre régna dans leur atelier, et chacun, courbé sur sa planche de cuivre, ne détourna pas la tête un seul instant.

14.

El último día de esta triste semana, el viejo Heermans estaba sentado junto a su puerta, frente a su hija.

Le dernier jour de cette triste semaine, le vieux Heermans était assis sur le pas de sa porte, en face de sa fille.

15.

-Padre, ¿no me había dicho usted que veríamos a los hermanos Van-Buck todas las noches?

- Ne m'aviez-vous pas dit, mon cher père, que nous verrions les deux Van-Buck tous les soirs?

16.

-¡Pues sí! -contestó el orfebre- es verdad que no han aparecido por aquí desde hace ocho días; es algo raro.

- Hélas! répondit l'orfèvre, il est vrai qu'ils n'ont point paru de ce côté depuis huit jours; cela est bien singulier.

17.

-¿Entonces soy yo la causa de su ausencia? -dijo Wilhelmine-. Han dejado de venir a partir del momento en que llegué.

- Est-ce donc moi qui en suis cause? dit Wilhelmine; c'est depuis mon arrivée qu'ils ont cessé de venir.

18.

Al oír estas palabras ingenuamente pronunciadas, el anciano inclinó la cabeza y permaneció bastante rato sin hablar.

À ces paroles prononcées naïvement, le vieillard baissa la tête et demeura longtemps sans parler.

19.

-¡Oh, hija mía! ¡Oh, mi querida hija! -exclamó al fin mientras posaba los labios marchitos sobre la mano regordeta y fresca de su hija-. Es probable que los curas te hayan enseñado a detestar el amor, pero ¿te han enseñado cómo se le puede hacer frente? ¿No olvidarás a tu viejo padre una bella noche de verano?

- ô ma fille! ô ma chère fille! s'écria-t-il enfin, en pressant de ses lèvres flétries la main potelée et fraîche de son enfant. Ces moines t'ont appris sans doute à détester l'amour; mais t'ont-ils appris comment on lui résiste? ô Dieu! n'oublieras-tu pas ton vieux père dans quelque belle nuit d'été?

20.

Por toda respuesta, Wilhelmine sacudió la cabeza sonriendo.

Wilhelmine, pour toute réponse, secoua la tête en souriant.

21.

-Tu sonrisa es muy dulce, mi pequeño ángel; es dulce como la miel. ¡Quiera Dios que no se cambie jamás en lágrimas!

- Ton sourire est bien doux, mon petit ange; il est doux comme le miel; Dieu veuille qu'il ne se change jamais en larmes!

22.

-¡Oh! padre, ¿me considera tan bella como para ser tan desgraciada?

- Hélas! mon père, me croyez-vous si belle pour devoir être si malheureuse?

23.

En aquel momento, los dos grabadores aparecieron ante él, después de que Wilhelmine se hubiera retirado modestamente al verlos acercarse.

En ce moment, les deux graveurs parurent devant lui, après que Wilhelmine se fut retirée modestement à leur approche.

24.

-Hemos visto a tu hija, Heermans, y los dos hemos perdido la paz; nuestros sueños nos traicionan, háblanos con franqueza. ¿Aceptarías a alguno de los dos como yerno? Entonces pregúntale cuál es el que ella prefiere y, sea el que sea, será su esposa legítima. Nuestros talleres están repletos de obreros como los tuyos, nuestra clientela es magnífica. Tu verás lo que decides.

- Nous avons vu ta fille, Heermans, et nous avons perdu tous deux le sommeil: nos rêves nous trahissent l'un à l'autre; parle-nous franchement. Veux-tu de l'un de nous pour ton gendre? Alors demande-lui qui elle préfère, et, quel qu'il soit, elle deviendra sa femme légitime. Nos ateliers sont remplis d'ouvriers aussi nombreux que les tiens; notre clientèle est magnifique. Vois ce que tu décides.

25.

El orfebre les tendió las dos manos.

L'orfèvre leur tendit ses deux mains.

26.

-Les pido tres días -dijo-. ¿Es demasiado? Veo bien que están enamorados.

- Je vous demande trois jours, dit-il, est-ce trop? Vous êtes amoureux, je le vois.

27.

-Es cierto -contestaron los grabadores-; amamos a tu hija, pero no debes dejarnos amarla sin esperanza.

- Il est vrai, répondirent les graveurs; nous aimons ta fille, et il ne faut pas nous laisser le temps de l'aimer sans espoir de guérison.

28.

Por la noche, la joven apenas se atrevió a levantar los ojos; sabía que debía elegir. A la mañana siguiente, el viejo Heermans envió a los dos hermanos una carta concebida en estos términos:

Le soir, à peine la jeune fille osa-t-elle lever les yeux; elle savait qu'elle devait choisir. Le lendemain, le vieil Heermans envoya aux deux frères une lettre ainsi conçue:

29.

«Mi hija los ha visto a los dos; amará a Tristán como esposo y a Henri como hermano. ¡Ojalá sea recibido este deseo, que le he arrancado con esfuerzo, como debe serlo! Los espera el viejo amigo de ustedes, para estrechar entre sus brazos a toda su familia.»

«Ma fille vous a vus tous deux; elle chérira Tristan comme un époux et Henri comme un frère. Puisse cet aveu, que je lui arrache avec peine, être reçu par vous comme il doit l'être! Votre vieil ami vous attend pour serrer dans ses bras sa famille tout entière.»

30.

Aquellos nobles corazones habían convenido que una vez que uno fuera aceptado, el otro se callaría para siempre. ¡Ay! así son los pactos que uno hace antes de conocer su destino. Henri, que había cogido la carta del orfebre para leerla, no pudo terminarla; la dejó sobre la mesa y, pálido como la nieve, se derrumbó sobre su taburete.

Ces nobles coeurs étaient convenus entre eux que, l'un accepté, l'autre se tairait à jamais. Hélas! tels sont les pactes que l'on fait avant de connaître son sort. Henri, qui avait pris la lettre de l'orfèvre pour la lire, ne put l'achever; il la posa sur la table, et, pâle comme la neige, il tomba sur son escabeau.

31.

Sin embargo, siguieron viviendo juntos en buena armonía. Iban, como de costumbre, todas las noches a casa del orfebre; el feliz prometido cortejaba a su novia; Henri se esforzaba por mostrarse alegre, y sólo su palidez desmentía la calma que aparentaba.

Cependant ils continuèrent à vivre ensemble en bonne intelligence. Ils se rendaient même comme de coutume tous les soirs chez l'orfèvre; l'heureux fiancé y faisait la cour à sa prétendue; Henri lui-même s'efforçait de témoigner de la joie, et sa pâleur seule démentait le calme qu'il affectait.

32.

Un día que los dos hermanos se encontraban cazando, se detuvieron en un claro del bosque; cansados de andar, se tendieron sobre la hierba.

Un jour que les deux frères étaient à la chasse, ils s'arrêtèrent dans la clairière d'un bois; fatigués de leur marche, ils s'étendirent sur le gazon.

33.

-Tristán, -dijo Henri Van-Buck- hace tiempo que guardo silencio; pero necesito abrirte mi alma. Me resulta imposible permitir que te cases con la hija del orfebre.

- Tristan, dit Henri Van-Buck, voilà assez longtemps que je me tais; il faut que je t'ouvre mon âme. Il m'est impossible de te laisser épouser la fille de cet orfèvre.

34.

-Hermano -respondió Tristán- ¿así respetas las leyes del honor?

- Mon frère, répondit Tristan, est-ce ainsi que vous vous souvenez des lois de l'honneur?

35.

-Sé que infrinjo esas leyes; lo he pensado mucho antes de hablar contigo, pero mírame bien: siento que me estoy muriendo, aunque la poca sangre que me queda en las venas me corroe como el fuego.

- Je sais que je manque à ces lois; j'y ai réfléchi longtemps avant de vous en parler; mais regardez-moi: je ne vis plus; je me sens m'en aller, et cependant le peu de sang que j'ai dans les veines me ronge comme du feu.

36.

-Ya lo veo- contestó Tristán- ¿crees que no sufro al verte reducido a esta situación? Yo también he perdido toda mi alegría, pero ¿qué remedio hay?

- Je le vois, répondit Tristan; croyez-vous que je n'endure pas de grandes douleurs à vous réduire à cette extrémité? Hélas! j'en perds aussi toute ma joie; mais quel remède?

37.

-Ninguno, hermano; sólo quiero una cosa de ti y te suplico que me la concedas. No te cases con esa chica hasta que yo haya muerto.

- Aucun, mon frère; je ne veux de vous qu'une chose, et je vous supplie de me l'accorder. N'épousez pas cette jeune fille avant que je ne sois mort.

38.

-¡Muerto! -exclamó el otro.

- Mort! s'écria l'autre.

39.

-Sí, mi querido Tristán, es necesario. Te ruego encarecidamente que me des tu palabra, pues si tuviera que firmar tu contrato…

- Oui, mon cher Tristan, il le faut. Je vous conjure de m'en donner votre parole, car s'il me fallait signer votre contrat...

40.

-No, hermano, es imposible que mueras de desesperación. ¿Quieres que te prometa una cosa que me hiela el corazón sólo de pensarla?

- Non, mon frère, il est impossible que vous mouriez ainsi de votre désespoir; voulez-vous que je vous promette une chose qui me glace le cœur en y pensant?

41.

Mientras pronunciaba estas palabras, Tristán miró a su hermano y vio la palidez de la muerte en sus labios.

En disant ces paroles, Tristan regarda son frère; il vit la pâleur du trépas sur ses lèvres.

42.

-Mi querido Henri -exclamó- antes de verte morir así soy capaz de cederte mis derechos. Cásate con ella, te lo ruego; yo me iré a Estados Unidos.

- Mon cher Henri, s'écria-t-il, plutôt que de vous laisser ainsi périr, je vous céderai mes droits. Épousez-la, je vous en prie; je passerai aux États-Unis.

43.

-¡Que me case con ella! -dijo el otro-. Y al trasmitirme tus derechos me transmitirás también su amor? Hace falta que uno de los dos muera -añadió con voz lúgubre, mientras su mano temblaba y se golpeaba con el mango de su cuchillo de caza.

- Que je l'épouse! s'écria l'autre. Me transmettrez-vous son amour en me transmettant vos droits? Il faut pourtant que l'un de nous deux en meure, ajouta-t-il d'une voix sombre. Sa main tremblait et battait contre la poignée de son couteau de chasse.

44.

-Sí, -contestó Tristán. 

- Oui, répondit Tristan.

45.

Y ambos se levantaron automáticamente.

Ils se levèrent machinalement tous deux.

46.

-No veo nada más que un camino -dijo Henri.

- Je ne vois qu'un moyen, dit Henri.

47.

Ambos sacaron sus cuchillos y se pusieron en guardia. Pero, acostumbrados a ejercitarse juntos y conociendo todos sus golpes, no se alcanzaban sino raramente. Durante una hora entera se lanzaron golpes furiosos, y de vez en cuando descansaban pues se encontraban agotados y con grandes heridas en los costados.

Tous deux tirèrent leur couteau et se mirent en garde. Mais, accoutumés à faire des armes ensemble, et connaissant tous leurs coups, ils ne pouvaient s'atteindre que rarement. Pendant une heure entière ils se portèrent des coups furieux, et de temps en temps ils se reposaient, épuisés de fatigue et les flancs ouverts par de larges blessures.

48.

Durante una de esas pausas, oyeron los tambores que advertían a los ciudadanos que debían volver a la ciudad. Era la hora en la que, en tantas ocasiones, habían regresado juntos, cogidos del brazo, tristes o alegres, con los pies cubiertos de polvo; y se contaban sus más secretos pensamientos. Toda su juventud pasó ante sus ojos en aquel momento.

Pendant l'une de ces pauses, ils entendirent les tambours avertir les citoyens de rentrer dans la ville. C'était l'heure où, tant de fois, ils étaient revenus ensemble, en se tenant le bras, tristes ou gais, les pieds couverts de poussière; ils s'entretenaient alors de leurs plus secrètes pensées. Toute leur jeunesse se déroula devant eux en cet instant.

49.

El sol iba a desaparecer; sus últimos rayos se deslizaban entre los abetos descarnados, sobre un alcor cubierto de hojas secas. El rocío de la tarde curvaba la hierba, y los pájaros saludaban la noche.

Le soleil allait disparaître; ses derniers rayons glissaient entre les sapins décharnés, sur le tertre couvert de feuilles sèches. La rosée du soir faisait plier l'herbe, et les oiseaux saluaient la nuit.

50.

Tristán volvió la cabeza y vio en el valle los campanarios de su ciudad natal surgir entre la niebla. Sus entrañas se conmovieron y dio un paso hacia su hermano tendiéndole la mano. Pero una debilidad mortal se adueñó de su alma; se apoyó sobre un árbol; sus hombros resbalaron sobre la áspera corteza y cayó.

Tristan détourna la tête; il vit dans la vallée les clochers de la ville natale sortir du brouillard, et la rivière s'étendre sur la prairie comme une couleuvre blanche dans les herbes. Ses entrailles s'émurent, il fit un pas vers son frère en lui tendant la main. Mais une faiblesse mortelle lui saisit l'âme; il s'appuya sur un arbre; ses épaules glissèrent sur l'écorce raboteuse; il tomba.

51.

Henri contemplaba con horror los últimos esfuerzos de su hermano por aferrarse a la vida; le habría gustado acercarse a él, pero tampoco él podía moverse. Ahogado en su sangre, de pie e inmóvil, se tambaleaba como un hombre ebrio.

Henri contemplait avec horreur les derniers efforts de son frère pour ressaisir la vie; il eut voulu marcher vers lui, mais lui-même ne pouvait bouger. Noyé de sang, debout et immobile, il vacillait comme un homme ivre.

52.

Aquellos dos infortunados habían tenido una madre que los había amado tiernamente. Desde el fondo del valle, en el crepúsculo, una forma difusa pareció dibujarse de repente y dirigirse hacia ellos. Subía lentamente a la colina, y a medida que se acercaba, los hijos reconocían a su madre. En el momento en que el espectro pareció enteramente visible y reconocible, el que estaba de pie, haciendo un esfuerzo supremo, abandonó el lugar en el que estaba clavado, y fue a arrojarse en los brazos del que estaba en el suelo.

Ces deux infortunés avaient eu une mère qui les avait tendrement aimés. Du fond de la vallée, dans le crépuscule, une forme vague sembla tout à coup se détacher et s'avancer vers eux. Elle montait lentement la colline, et à mesure qu'elle approchait, les fils reconnaissaient leur mère. Au moment où le spectre parut entièrement visible et reconnaissable, celui qui était debout, par un suprême effort, quitta la place où il était cloué, et alla se jeter dans les bras de celui qui gisait à terre.

53.

Así, cubiertos de sangre y de lágrimas, expiraron los dos en un último abrazo.

Ainsi tous deux, couverts de sang et de larmes, expirèrent dans un dernier embrassement.

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