La arlesiana / L'arlésienne - Alphonse Daudet
1.

Para ir al lugar, bajando de mi molino, se pasa por delante de una granja, levantada cerca de la carretera, al fondo de un gran patio plantado de guindos. Es aquella la verdadera casa del cortijero de Provenza, con sus tejas rojas, su extensa fachada negruzca, irregularmente horadada, y allá, en lo alto, la veleta del granero, la polea para izar las muelas y algunas gavillas de heno que asoman por las ventanas.

Pour aller au village, en descendant de mon moulin, on passe devant un mas bâti près de la route au fond d’une grande cour plantée de micocouliers. C’est la vraie maison du ménager de Provence, avec ses tuiles rouges, sa large façade brune irrégulièrement percée, puis tout en haut la girouette du grenier, la poulie pour hisser les meules, et quelques touffes de foin brun qui dépassent.

2.

¿Por qué aquella casa me había impresionado tanto? ¿Por qué aquel portal cerrado me oprimía el corazón? No habría podido decirlo. Y sin embargo, aquella vivienda me causaba frío... Había demasiado silencio en derredor de ella... Cuando por allí pasaba, no ladraban los perros, las gallinas huían sin cacarear... En el interior, nada, ni una voz, ni un cascabeleo de mula... Sin las cortinas blancas de las ventanas y la humareda que subía del techo, habríase creído la casa deshabitada.

Pourquoi cette maison m’avait-elle frappé ? Pourquoi ce portail fermé me serrait-il le cœur ? Je n’aurais pas pu le dire, et pourtant ce logis me faisait froid. Il y avait trop de silence autour… Quand on passait, les chiens  n’aboyaient pas, les pintades s’enfuyaient sans crier… À l’intérieur, pas une voix ! Rien, pas même un grelot de mule… Sans les rideaux blancs des fenêtres et la fumée qui montait des toits, on aurait cru l’endroit inhabité.

3.

Ayer, cerca del medio día, volvía yo del pueblo, y para resguardarme del sol, andaba arrimado a las paredes del cortijo buscando la sombra de los guindos. En el camino, ante la masía, algunos criados silenciosos acababan de cargan una carreta de heno. Las puertas habían quedado abiertas. Lancé una mirada al pasar, y allá en el fondo del patio, de codos sobre una mesa de piedra, la cabeza entre las manos, vi un anciano canoso, con un traje exoesivamente corto y unos calzones hechos pedazos. Me detuve. Uno de los hombres me dijo en voz muy baja: 

Hier, sur le coup de midi, je revenais du village, et, pour éviter le soleil, je longeais les murs de la ferme, dans l’ombre des micocouliers… Sur la route, devant le mas, des valets silencieux achevaient de charger une charrette de foin… Le portail était resté ouvert. Je jetai un regard en passant, et je vis, au fond de la cour, accoudé, — la tête dans ses mains, — sur une large table de pierre, un grand vieux tout blanc, avec une veste trop courte et des culottes en lambeaux… Je m’arrêtai. Un des hommes me dit tout bas :

4.

"¡Chist! Es el amo. Está así desde la desgracia de su hijo". 

— Chut ! c’est le maître… Il est comme ça depuis le malheur de son fils.

5.

En este momento, una mujer y un niño, vestidos de negro, pasaron cerca de nosotros, llevando grandes devociocionarios dorados, y entraron en la casa.

À ce moment une femme et un petit garçon, vêtus de noir, passèrent près de nous avec de gros paroissiens dorés, et entrèrent à la ferme.

6.

El hombre añadió:

L’homme ajouta :

7.

-Son el ama y el pequeño que vuelven de misa. Van todos los días desde que el chico se mató. ¡Ah, caballero, qué desolación! El padre lleva todavía las ropas del muerto. Nadie ha conseguido hacérselas quitar... ¡Ohé..! ¡Oh! ¡Arre, mula!

— … La maîtresse et Cadet qui reviennent de la messe. Ils y vont tous les jours, depuis que l’enfant s’est tué… Ah ! monsieur, quelle désolation !… Le père porte encore les habits du mort ; on ne peut pas les lui faire quitter… Dia ! hue ! la bête !

8.

La carreta se movió para partir. Yo, que deseaba saber más, pedí permiso al carretero para subir a su lado, y allá arriba, sobre el heno, fue donde supe toda aquella tristísima historia.

La charrette s’ébranla pour partir. Moi, qui voulais en savoir plus long, je demandai au voiturier de monter à côté de lui, et c’est là-haut, dans le foin, que j’appris toute cette navrante histoire…

9.

Se llamaba Juan. Era un admirable labriego de veinte años; listo como una pólvora, forzudo y de franca y abierta fisonomía. Como era muy guapo, las mujeres lo miraban todas, pero él no se fijaba más que en una; en una arlesiana, vestida de terciopelo y encajes, a quien una vez vio en la feria de Arlés. En la masía no vieron al principio con gusto aquellos amores. La joven tenía fama de coqueta, y sus parientes no eran del país. Pero Juan quería a su arlesiana a pesar de todo. Decía: 

Il s’appelait Jan. C’était un admirable paysan de vingt ans, sage comme une fille, solide et le visage ouvert. Comme il était très beau, les femmes le regardaient ; mais lui n’en avait qu’une en tête, — une petite Arlésienne, toute en velours et en dentelles, qu’il avait rencontrée sur la Lice d’Arles, une fois. — Au mas, on ne vit pas d’abord cette liaison avec plaisir. La fille passait  pour coquette, et ses parents n’étaient pas du pays. Mais Jan voulait son Arlésienne à toute force. Il disait :

10.

"Me mato si no me la dan". 

— Je mourrai si on ne me la donne pas.

11.

No hubo más remedio que pasar por ello. Decidióse casarlos después de la siega.

Il fallut en passer par là. On décida de les marier après la moisson.

12.

Bueno, un domingo por la noche, acababa de comer la familia en el patio de la masía. Era aquella casi una comida de boda. La novia no asistía, pero habíase bebido y brindado siempre a su salud. Un hombre se presenta en la puerta y con voz temblona pide hablar al señor Esteban, pero a Esteban nada más, a él solo. Esteban se levanta y sale a la calle.

Donc, un dimanche soir, dans la cour du mas, la famille achevait de dîner. C’était presque un repas de noces. La fiancée n’y assistait pas, mais on avait bu en son honneur tout le temps… Un homme se présente à la porte, et, d’une voix qui tremble, demande à parler à maître Estève, à lui seul. Estève se lève et sort sur la route.

13.

-Nostramo-le dice el hombre;-va usted a casar a su hijo con una perdida que ha sido mi querida durante algunos años. Esto que digo, lo pruebo; aquí traigo cartas de ella. Sus parientes lo saben todo y me la habían prometido; pero desde que su hijo la pretende, ni ellos ni la muchacha me quieren ya a mí. Yo creía, como era natural, que después de lo sucedido, ella no podía ser la mujer de otro.

— Maître, lui dit l’homme, vous allez marier votre enfant à une coquine, qui a été ma maîtresse pendant deux ans. Ce que j’avance, je le prouve : voici des lettres !… Les parents savent tout et me l’avaient promise ; mais, depuis que votre fils la recherche, ni eux ni la belle ne veulent plus de moi… J’aurais cru pourtant qu’après ça elle ne pouvait pas être la femme d’un autre.

14.

-Está bien-dijo el señor Esteban, cuando hubo leído las cartas; -entra a beber un trago de moscatel.

— C’est bien! dit maître Estève quand il  eut regardé les lettres; entrez boire un verre de muscat.

15.

El hombre contestó:

L’homme répond:

16.

-No, gracias; tengo más tristeza que sed.

— Merci! j’ai plus de chagrin que de soif.

17.

Y se fue.

Et il s’en va.

18.

El padre vuelve a entrar, impasible. Ocupa de nuevo su puesto en la mesa y la comida se acaba alegremente.

Le père rentre, impassible; il reprend sa place à table ; et le repas s’achève gaiement.

19.

Aquella noche, el señor Esteban y su hijo salieron juntos a pasear por el campo. Permanecieron fuera mucho tiempo; cuando volvieron, la madre les esperaba todavía.

Ce soir-là, maître Estève et son fils s’en allèrent ensemble dans les champs. Ils restèrent longtemps dehors ; quand ils revinrent, la mère les attendait encore.

20.

-Mujer- dijo el cortijero, empujando hacia ella a su hijo,-abrázalo. ¡Es muy desgraciado!

— Femme, dit le ménager, en lui amenant son fils, embrasse-le ! il est malheureux.

21.

Juan no habló más de la arlesiana. Seguía amándola, sin embargo, y hasta más que nunca, desde que se la habían mostrado en brazos de otro. Solo que era demasiado altivo para confiárselo a nadie. ¡Esto fue lo que lo mató; pobre chico! A veces, pasábase los días enteros solo en un rincón, sin dar señales de vida. Otros días, lanzábase a trabajar la tierra con rabia y hacía él sólo el trabajo de diez jornaleros. Ya entrada, la noche, tomaba el camino de Arlés y andiaba, andaba, hasta que veía destacar en el horizonte los campanarios de la villa. Entonces se volvía. Jamás fue más allá.

Jan ne parla plus de l’Arlésienne. Il l’aimait toujours cependant, et même plus que jamais, depuis qu’on la lui avait montrée dans les bras d’un autre. Seulement il était trop fier pour rien dire ; c’est ce qui le tua, le pauvre enfant !… Quelquefois il passait des journées entières seul dans un coin, sans bouger. D’autres jours, il se mettait à la  terre avec rage et abattait à lui seul le travail de dix journaliers… Le soir venu, il prenait la route d’Arles et marchait devant lui jusqu’à ce qu’il vît monter dans le couchant les clochers grêles de la ville. Alors il revenait. Jamais il n’alla plus loin.

22.

Viéndolo así, tan triste y tan solo, las gentes de la masía no sabían qué hacer. Temíase una desgracia. Una vez, en la mesa, su madre, mirándolo con los ojos llenos de lágrimas, le dijo:

De le voir ainsi, toujours triste et seul, les gens du mas ne savaient plus que faire. On redoutait un malheur… Une fois, à table, sa mère, en le regardant avec des yeux pleins de larmes, lui dit :

23.

-Pues bien; oye, Juan. Si a pesar de todo, tú la quieres, te la daremos.

— Eh bien ! écoute, Jan, si tu la veux tout de même, nous te la donnerons…

24.

El padre, rojo de vergüenza, bajó la cabeza...

Le père, rouge de honte, baissait la tête.

25.

Juan hizo señal de que no, y salió.

Jan fit signe que non, et il sortit.

26.

A partir de aquel día, cambió su modo de vivir, afectando siempre estar alegre para tranquilizar a su familia. Volvió a vérsele en los bailes, en la taberna, en las herradas. En la fiesta de Fonvielle fue él quien abrió el baile.

À partir de ce jour, il changea sa façon de vivre, affectant d’être toujours gai, pour rassurer ses parents. On le revit au bal, au cabaret, dans les ferrades. À la vote de Fonvieille, c’est lui qui mena la farandole.

27.

El padre decía: "Está curado". La madre tenía siempre sus temores, y más que nunca vigilaba a su hijo. Juan dormía con su hermano menor, muy cerca de la herrería. La pobre vieja se hizo preparar una cama al lado de su cuarto... Los herreros podían necesitarla durante la noche...

Le père disait: «Il est guéri.» La mère, elle, avait toujours des craintes et plus que jamais surveillait son enfant… Jan couchait avec Cadet, tout près de la magnanerie ; la  pauvre vieille se fit dresser un lit à côté de leur chambre… Les magnans pouvaient avoir besoin d’elle, dans la nuit.

28.

Llegó la fiesta de San Eloy, patrono de los cortijeros.

Vint la fête de saint Éloi, patron des ménagers.

29.

Gran jolgorio en la masía. Hubo dulces para todo el mundo y vinos en abundancia. Luego petardos y fuegos artificiales y lamparillas de color colgadas de los guindos ... ¡Viva San Eloyl Se bailó hasta reventar. El pequefio se chasmuscó la blusa nueva. Juan mismo parecía contento. Hasta quiso hacer bailar a su madre. La pobre mujer lloró de alegría.

Grande joie au mas… Il y eut du châteauneuf pour tout le monde et du vin cuit comme s’il en pleuvait. Puis des pétards, des feux sur l’aire, des lanternes de couleur plein les micocouliers… Vive saint Éloi ! On farandola à mort. Cadet brûla sa blouse neuve… Jan lui-même avait l’air content; il voulut faire danser sa mère; la pauvre femme en pleurait de bonheur.

30.

A media noche, se fue todo el mundo a descansar. Todos tenían necesidad de dormir. Juan no dormía. Su hermano ha contado luego que toda la noche la pasó sollozando.

À minuit, on alla se coucher. Tout le monde avait besoin de dormir… Jan ne dormit pas, lui. Cadet a raconté depuis que toute la nuit il avait sangloté… Ah! je vous réponds qu’il était bien mordu, celui-là…

31.

Al otro dia, al apuntar el alba, la madre oyó que alguien atravesaba su cuarto corriendo. La infeliz tuvo como un presentimiento. 

Le lendemain, à l’aube, la mère entendit quelqu’un traverser sa chambre en  courant. Elle eut comme un pressentiment :

32.

"Juan, ¿eres tú?" 

— Jan, c’est toi?

33.

Juan no responde. Está ya en la escalera. 

Jan ne répond pas; il est déjà dans l’escalier.

34.

Deprisa, deprisa, la madre se levanta. 

Vite, vite la mère se lève :

35.

"Juan ¿dónde vas?" Juan sube al granero. 

— Jan, où vas-tu?

36.

Ella sube tras él. 

Il monte au grenier; elle monte derrière lui:

37.

"Hijo mío, ¡en nombre del cielo!..." 

— Mon fils, au nom du ciel!

38.

Él cierra la puerta y corre el cerrojo.

Il ferme la porte et tire le verrou.

39.

"Juan, mi Juanito, contéstame. ¿Qué vas a hacer?" 

— Jan, mon Janet, réponds-moi. Que vas-tu faire?

40.

A tientas, con sus pobres manos que tiemblan, busca el pestillo... Una ventana que se abre, el ruido de un cuerpo sobre las baldosas del patio... y eso fue todo

À tâtons, de ses vieilles mains qui tremblent, elle cherche le loquet… Une fenêtre qui s’ouvre, le bruit d’un corps sur les dalles de la cour, et c’est tout…

41.

El debió decirse: "Yo la quiero demasiado... Yo me voy..." ¡Ah! ¡Qué miserables corazones los nuestros! ¡Es muy fuerte que el desprecio no pueda matar el amor!

Il s’était dit, le pauvre enfant: « Je l’aime trop… Je m’en vais… » Ah ! misérables cœurs que nous sommes ! C’est un peu fort pourtant que le mépris ne puisse pas tuer l’amour!

42.

Aquella mañana las gentes del pueblo se preguntaron que quién podía gritar así, allá abajo, del lado de la masía de Esteban.

Ce matin-là, les gens du village se demandèrent qui pouvait crier ainsi, là-bas, du côté du mas d’Estève.

43.

Era que en el patio, ante la mesa de piedra, cubierta de rocío y de sangre, la madre, casi desnuda, lloraba teniendo en brazos el cadáver de su hijo.

C’était, dans la cour, devant la table de pierre couverte de rosée et de sang, la mère toute nue qui se lamentait, avec son enfant mort sur ses bras.

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Alphonse Daudet

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La arlesiana / L'arlésienne

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1.

Para ir al lugar, bajando de mi molino, se pasa por delante de una granja, levantada cerca de la carretera, al fondo de un gran patio plantado de guindos. Es aquella la verdadera casa del cortijero de Provenza, con sus tejas rojas, su extensa fachada negruzca, irregularmente horadada, y allá, en lo alto, la veleta del granero, la polea para izar las muelas y algunas gavillas de heno que asoman por las ventanas.

Pour aller au village, en descendant de mon moulin, on passe devant un mas bâti près de la route au fond d’une grande cour plantée de micocouliers. C’est la vraie maison du ménager de Provence, avec ses tuiles rouges, sa large façade brune irrégulièrement percée, puis tout en haut la girouette du grenier, la poulie pour hisser les meules, et quelques touffes de foin brun qui dépassent.

2.

¿Por qué aquella casa me había impresionado tanto? ¿Por qué aquel portal cerrado me oprimía el corazón? No habría podido decirlo. Y sin embargo, aquella vivienda me causaba frío... Había demasiado silencio en derredor de ella... Cuando por allí pasaba, no ladraban los perros, las gallinas huían sin cacarear... En el interior, nada, ni una voz, ni un cascabeleo de mula... Sin las cortinas blancas de las ventanas y la humareda que subía del techo, habríase creído la casa deshabitada.

Pourquoi cette maison m’avait-elle frappé ? Pourquoi ce portail fermé me serrait-il le cœur ? Je n’aurais pas pu le dire, et pourtant ce logis me faisait froid. Il y avait trop de silence autour… Quand on passait, les chiens  n’aboyaient pas, les pintades s’enfuyaient sans crier… À l’intérieur, pas une voix ! Rien, pas même un grelot de mule… Sans les rideaux blancs des fenêtres et la fumée qui montait des toits, on aurait cru l’endroit inhabité.

3.

Ayer, cerca del medio día, volvía yo del pueblo, y para resguardarme del sol, andaba arrimado a las paredes del cortijo buscando la sombra de los guindos. En el camino, ante la masía, algunos criados silenciosos acababan de cargan una carreta de heno. Las puertas habían quedado abiertas. Lancé una mirada al pasar, y allá en el fondo del patio, de codos sobre una mesa de piedra, la cabeza entre las manos, vi un anciano canoso, con un traje exoesivamente corto y unos calzones hechos pedazos. Me detuve. Uno de los hombres me dijo en voz muy baja: 

Hier, sur le coup de midi, je revenais du village, et, pour éviter le soleil, je longeais les murs de la ferme, dans l’ombre des micocouliers… Sur la route, devant le mas, des valets silencieux achevaient de charger une charrette de foin… Le portail était resté ouvert. Je jetai un regard en passant, et je vis, au fond de la cour, accoudé, — la tête dans ses mains, — sur une large table de pierre, un grand vieux tout blanc, avec une veste trop courte et des culottes en lambeaux… Je m’arrêtai. Un des hommes me dit tout bas :

4.

"¡Chist! Es el amo. Está así desde la desgracia de su hijo". 

— Chut ! c’est le maître… Il est comme ça depuis le malheur de son fils.

5.

En este momento, una mujer y un niño, vestidos de negro, pasaron cerca de nosotros, llevando grandes devociocionarios dorados, y entraron en la casa.

À ce moment une femme et un petit garçon, vêtus de noir, passèrent près de nous avec de gros paroissiens dorés, et entrèrent à la ferme.

6.

El hombre añadió:

L’homme ajouta :

7.

-Son el ama y el pequeño que vuelven de misa. Van todos los días desde que el chico se mató. ¡Ah, caballero, qué desolación! El padre lleva todavía las ropas del muerto. Nadie ha conseguido hacérselas quitar... ¡Ohé..! ¡Oh! ¡Arre, mula!

— … La maîtresse et Cadet qui reviennent de la messe. Ils y vont tous les jours, depuis que l’enfant s’est tué… Ah ! monsieur, quelle désolation !… Le père porte encore les habits du mort ; on ne peut pas les lui faire quitter… Dia ! hue ! la bête !

8.

La carreta se movió para partir. Yo, que deseaba saber más, pedí permiso al carretero para subir a su lado, y allá arriba, sobre el heno, fue donde supe toda aquella tristísima historia.

La charrette s’ébranla pour partir. Moi, qui voulais en savoir plus long, je demandai au voiturier de monter à côté de lui, et c’est là-haut, dans le foin, que j’appris toute cette navrante histoire…

9.

Se llamaba Juan. Era un admirable labriego de veinte años; listo como una pólvora, forzudo y de franca y abierta fisonomía. Como era muy guapo, las mujeres lo miraban todas, pero él no se fijaba más que en una; en una arlesiana, vestida de terciopelo y encajes, a quien una vez vio en la feria de Arlés. En la masía no vieron al principio con gusto aquellos amores. La joven tenía fama de coqueta, y sus parientes no eran del país. Pero Juan quería a su arlesiana a pesar de todo. Decía: 

Il s’appelait Jan. C’était un admirable paysan de vingt ans, sage comme une fille, solide et le visage ouvert. Comme il était très beau, les femmes le regardaient ; mais lui n’en avait qu’une en tête, — une petite Arlésienne, toute en velours et en dentelles, qu’il avait rencontrée sur la Lice d’Arles, une fois. — Au mas, on ne vit pas d’abord cette liaison avec plaisir. La fille passait  pour coquette, et ses parents n’étaient pas du pays. Mais Jan voulait son Arlésienne à toute force. Il disait :

10.

"Me mato si no me la dan". 

— Je mourrai si on ne me la donne pas.

11.

No hubo más remedio que pasar por ello. Decidióse casarlos después de la siega.

Il fallut en passer par là. On décida de les marier après la moisson.

12.

Bueno, un domingo por la noche, acababa de comer la familia en el patio de la masía. Era aquella casi una comida de boda. La novia no asistía, pero habíase bebido y brindado siempre a su salud. Un hombre se presenta en la puerta y con voz temblona pide hablar al señor Esteban, pero a Esteban nada más, a él solo. Esteban se levanta y sale a la calle.

Donc, un dimanche soir, dans la cour du mas, la famille achevait de dîner. C’était presque un repas de noces. La fiancée n’y assistait pas, mais on avait bu en son honneur tout le temps… Un homme se présente à la porte, et, d’une voix qui tremble, demande à parler à maître Estève, à lui seul. Estève se lève et sort sur la route.

13.

-Nostramo-le dice el hombre;-va usted a casar a su hijo con una perdida que ha sido mi querida durante algunos años. Esto que digo, lo pruebo; aquí traigo cartas de ella. Sus parientes lo saben todo y me la habían prometido; pero desde que su hijo la pretende, ni ellos ni la muchacha me quieren ya a mí. Yo creía, como era natural, que después de lo sucedido, ella no podía ser la mujer de otro.

— Maître, lui dit l’homme, vous allez marier votre enfant à une coquine, qui a été ma maîtresse pendant deux ans. Ce que j’avance, je le prouve : voici des lettres !… Les parents savent tout et me l’avaient promise ; mais, depuis que votre fils la recherche, ni eux ni la belle ne veulent plus de moi… J’aurais cru pourtant qu’après ça elle ne pouvait pas être la femme d’un autre.

14.

-Está bien-dijo el señor Esteban, cuando hubo leído las cartas; -entra a beber un trago de moscatel.

— C’est bien! dit maître Estève quand il  eut regardé les lettres; entrez boire un verre de muscat.

15.

El hombre contestó:

L’homme répond:

16.

-No, gracias; tengo más tristeza que sed.

— Merci! j’ai plus de chagrin que de soif.

17.

Y se fue.

Et il s’en va.

18.

El padre vuelve a entrar, impasible. Ocupa de nuevo su puesto en la mesa y la comida se acaba alegremente.

Le père rentre, impassible; il reprend sa place à table ; et le repas s’achève gaiement.

19.

Aquella noche, el señor Esteban y su hijo salieron juntos a pasear por el campo. Permanecieron fuera mucho tiempo; cuando volvieron, la madre les esperaba todavía.

Ce soir-là, maître Estève et son fils s’en allèrent ensemble dans les champs. Ils restèrent longtemps dehors ; quand ils revinrent, la mère les attendait encore.

20.

-Mujer- dijo el cortijero, empujando hacia ella a su hijo,-abrázalo. ¡Es muy desgraciado!

— Femme, dit le ménager, en lui amenant son fils, embrasse-le ! il est malheureux.

21.

Juan no habló más de la arlesiana. Seguía amándola, sin embargo, y hasta más que nunca, desde que se la habían mostrado en brazos de otro. Solo que era demasiado altivo para confiárselo a nadie. ¡Esto fue lo que lo mató; pobre chico! A veces, pasábase los días enteros solo en un rincón, sin dar señales de vida. Otros días, lanzábase a trabajar la tierra con rabia y hacía él sólo el trabajo de diez jornaleros. Ya entrada, la noche, tomaba el camino de Arlés y andiaba, andaba, hasta que veía destacar en el horizonte los campanarios de la villa. Entonces se volvía. Jamás fue más allá.

Jan ne parla plus de l’Arlésienne. Il l’aimait toujours cependant, et même plus que jamais, depuis qu’on la lui avait montrée dans les bras d’un autre. Seulement il était trop fier pour rien dire ; c’est ce qui le tua, le pauvre enfant !… Quelquefois il passait des journées entières seul dans un coin, sans bouger. D’autres jours, il se mettait à la  terre avec rage et abattait à lui seul le travail de dix journaliers… Le soir venu, il prenait la route d’Arles et marchait devant lui jusqu’à ce qu’il vît monter dans le couchant les clochers grêles de la ville. Alors il revenait. Jamais il n’alla plus loin.

22.

Viéndolo así, tan triste y tan solo, las gentes de la masía no sabían qué hacer. Temíase una desgracia. Una vez, en la mesa, su madre, mirándolo con los ojos llenos de lágrimas, le dijo:

De le voir ainsi, toujours triste et seul, les gens du mas ne savaient plus que faire. On redoutait un malheur… Une fois, à table, sa mère, en le regardant avec des yeux pleins de larmes, lui dit :

23.

-Pues bien; oye, Juan. Si a pesar de todo, tú la quieres, te la daremos.

— Eh bien ! écoute, Jan, si tu la veux tout de même, nous te la donnerons…

24.

El padre, rojo de vergüenza, bajó la cabeza...

Le père, rouge de honte, baissait la tête.

25.

Juan hizo señal de que no, y salió.

Jan fit signe que non, et il sortit.

26.

A partir de aquel día, cambió su modo de vivir, afectando siempre estar alegre para tranquilizar a su familia. Volvió a vérsele en los bailes, en la taberna, en las herradas. En la fiesta de Fonvielle fue él quien abrió el baile.

À partir de ce jour, il changea sa façon de vivre, affectant d’être toujours gai, pour rassurer ses parents. On le revit au bal, au cabaret, dans les ferrades. À la vote de Fonvieille, c’est lui qui mena la farandole.

27.

El padre decía: "Está curado". La madre tenía siempre sus temores, y más que nunca vigilaba a su hijo. Juan dormía con su hermano menor, muy cerca de la herrería. La pobre vieja se hizo preparar una cama al lado de su cuarto... Los herreros podían necesitarla durante la noche...

Le père disait: «Il est guéri.» La mère, elle, avait toujours des craintes et plus que jamais surveillait son enfant… Jan couchait avec Cadet, tout près de la magnanerie ; la  pauvre vieille se fit dresser un lit à côté de leur chambre… Les magnans pouvaient avoir besoin d’elle, dans la nuit.

28.

Llegó la fiesta de San Eloy, patrono de los cortijeros.

Vint la fête de saint Éloi, patron des ménagers.

29.

Gran jolgorio en la masía. Hubo dulces para todo el mundo y vinos en abundancia. Luego petardos y fuegos artificiales y lamparillas de color colgadas de los guindos ... ¡Viva San Eloyl Se bailó hasta reventar. El pequefio se chasmuscó la blusa nueva. Juan mismo parecía contento. Hasta quiso hacer bailar a su madre. La pobre mujer lloró de alegría.

Grande joie au mas… Il y eut du châteauneuf pour tout le monde et du vin cuit comme s’il en pleuvait. Puis des pétards, des feux sur l’aire, des lanternes de couleur plein les micocouliers… Vive saint Éloi ! On farandola à mort. Cadet brûla sa blouse neuve… Jan lui-même avait l’air content; il voulut faire danser sa mère; la pauvre femme en pleurait de bonheur.

30.

A media noche, se fue todo el mundo a descansar. Todos tenían necesidad de dormir. Juan no dormía. Su hermano ha contado luego que toda la noche la pasó sollozando.

À minuit, on alla se coucher. Tout le monde avait besoin de dormir… Jan ne dormit pas, lui. Cadet a raconté depuis que toute la nuit il avait sangloté… Ah! je vous réponds qu’il était bien mordu, celui-là…

31.

Al otro dia, al apuntar el alba, la madre oyó que alguien atravesaba su cuarto corriendo. La infeliz tuvo como un presentimiento. 

Le lendemain, à l’aube, la mère entendit quelqu’un traverser sa chambre en  courant. Elle eut comme un pressentiment :

32.

"Juan, ¿eres tú?" 

— Jan, c’est toi?

33.

Juan no responde. Está ya en la escalera. 

Jan ne répond pas; il est déjà dans l’escalier.

34.

Deprisa, deprisa, la madre se levanta. 

Vite, vite la mère se lève :

35.

"Juan ¿dónde vas?" Juan sube al granero. 

— Jan, où vas-tu?

36.

Ella sube tras él. 

Il monte au grenier; elle monte derrière lui:

37.

"Hijo mío, ¡en nombre del cielo!..." 

— Mon fils, au nom du ciel!

38.

Él cierra la puerta y corre el cerrojo.

Il ferme la porte et tire le verrou.

39.

"Juan, mi Juanito, contéstame. ¿Qué vas a hacer?" 

— Jan, mon Janet, réponds-moi. Que vas-tu faire?

40.

A tientas, con sus pobres manos que tiemblan, busca el pestillo... Una ventana que se abre, el ruido de un cuerpo sobre las baldosas del patio... y eso fue todo

À tâtons, de ses vieilles mains qui tremblent, elle cherche le loquet… Une fenêtre qui s’ouvre, le bruit d’un corps sur les dalles de la cour, et c’est tout…

41.

El debió decirse: "Yo la quiero demasiado... Yo me voy..." ¡Ah! ¡Qué miserables corazones los nuestros! ¡Es muy fuerte que el desprecio no pueda matar el amor!

Il s’était dit, le pauvre enfant: « Je l’aime trop… Je m’en vais… » Ah ! misérables cœurs que nous sommes ! C’est un peu fort pourtant que le mépris ne puisse pas tuer l’amour!

42.

Aquella mañana las gentes del pueblo se preguntaron que quién podía gritar así, allá abajo, del lado de la masía de Esteban.

Ce matin-là, les gens du village se demandèrent qui pouvait crier ainsi, là-bas, du côté du mas d’Estève.

43.

Era que en el patio, ante la mesa de piedra, cubierta de rocío y de sangre, la madre, casi desnuda, lloraba teniendo en brazos el cadáver de su hijo.

C’était, dans la cour, devant la table de pierre couverte de rosée et de sang, la mère toute nue qui se lamentait, avec son enfant mort sur ses bras.

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